Musique :
« La liseuse
dans le marc de café »
Paroles , Blog de Lila
|
« Ni les morales ni les coutumes »
ne sont « le mental »
-Un
préfet qui ordonne
des
juges qui se démettent
beaucoup
d’experts qui supposent
des médecins qui entérinent
et un
supposé malade -
|
Page II
|
|
Dans tout le Site :
ü
Accueil =>
ü Plan du site,
liste des pages, écrits divers =>
Plan de la page :
1. Présentation du site
2. Etapes et jalons
3.
Conclusion
4.
Clôture
5.
Mes publications
6.
Lois sur la psychiatrie (vers 2000)
7.
Fin de page – notes de bas de page
Message principal de cette page :
« …lorsque
se constitue sous nos yeux une sorte de « nouvel ordre psy » qui
justifierait tous les « standards… »
|
Notes
de bas de page :
1.
La traversée de la méditerranée
2.
La toxicomanie
3.
Effets indésirables des médicaments
4.
Volumes
5.
Un idéal impossible
6.
Les constitutions
7.
Effets trompeurs
8.
Du « démuni d’esprit » au « démuni d’argent »
9.
Populations africaines-
10.
Toponymes
11. Croyances et
symbolique
12.
Ibn Battuta
13. Hal de Qsar es souk
|
Contact source Clic
|
|
|
|
|
Retour haut de page
Longtemps j’ai espéré lire un jour ce j’avais moi-même à dire. Ces
choses que je voyais, mal connues, je pensais qu’il fallait les dire. Ce jour
n’est jamais venu, c’est pourquoi j’ai créé ce site. J’ai mis alors « en
ligne », au début des année 2000, quelques articles courts que j’avais
écrits, longtemps plus tôt. Témoins de mes préoccupations, depuis mes premiers
pas dans la « psychiatrie » jusque devenu « psychiatre
des hôpitaux », ils en livrent un début d’analyse.
Puis l’actualité et certains projets m’apparurent
inquiétants, tout en confirmant l’analyse. Mais ces errements ne viennent
peut-être que de méconnaissances ou de malentendus. J’ai alors essayé d’en
faire une véritable systématisation pour le web, directement, espérant ainsi
aider au plus tôt et au mieux, tous ceux qui pourraient bénéficier de mon
appréhension des difficultés du sujet :
q
Quels sont donc les liens entre la médecine et
la psychiatrie ?
q
Qu'est-ce donc ce qu'on appelle « maladie
mentale » ?
q
S'il y a « maladie », de quel « genre
de maladie » s'agit-il ?
q
Pourquoi dit-on si souvent qu'elles sont «
incurables »?
q
Y aurait-il quiproquos, voire imposture à appeler « psychique » une maladie pour laquelle on ne met en place
que des mesures « physiques » : internements par contrainte et
médications?
q
Le « psychisme » existe-il
réellement ? Si oui, que peut-on entendre par ce mot?
q
Pourquoi la « psychanalyse »
n'est-elle jamais utilisée précisément là d'où elle est issue, et où il
semblerait qu'elle ait le plus sa raison d'être ?
q
Quelle peut-être la fonction d'une « demande ou
d'un refus de soins »?
q
Enfin, à tous moments, cette question de base, qui est
à l'origine même de « l'invention de la psychiatrie », en
France entre 1810 et 1838, et en tant qu'elle est bien autre chose que la médecine
des fous, qui, elle, est immémoriale : Peut-on, « par une même et
unique opération », concilier « les soins et l'ordre
public » et permettre le bon déroulement des ces deux domaines aussi
nécessaires l'un que l'autre ?
q
Peut-on, « par une même et unique
opération » en mélangeant, voire en « inversant les
rôles », des acteurs, médecins et policiers, eu égard à leurs
compétences, permettre le bon déroulement des ces deux domaines ?
Car,
c'est légalement le « policier » qui décide de « l'indication
de l'hospitalisation sous contrainte », en déclarant un sujet « atteint
de troubles psychiatriques », et, en pratique, c’est le « médecin »
qui met en oeuvre les moyens de contention, en général des « neuroleptiques »,
que lui seul a le droit de prescrire. Les « juges », eux, sont
exclus, exclusion, très insuffisamment encore dénoncée.
La réponse
est venue : « Non! » : L'un et l'autre, les « soins »
d’un côté, « ordre public » de l’autre, relèvent de procédures
et de procédés différents.
D'ailleurs
l'inefficacité de la psychiatrie en matière de lutte contre la « dangerosité »
pourrait faire frémir. A l'inverse, bien souvent elle l'aggrave. On remarquera
que depuis qu'elle existe, la psychiatrie n'a sans doute jamais contrôlé aucun
des grands responsables des massacres ni à l'échelle planétaire, ni
probablement même seulement à l'échelle familiale.
Mais que ne
la brandit-on pas lorsque l'on voudrait s'opposer au cours d'un procès! Ce qui
entrave le travail du médecin psychiatre, qu'il soit public ou privé est moins
son « ignorance médicale » des étiologies de la morbidité ou
l'insuffisance de son arsenal thérapeutique que « la législation »
elle-même dont on est étonné qu'elle perdure encore.
Au total ces
questions, élaborées par un médecin à la recherche des outils de travail dont
il avait besoin, aboutissent la plupart du temps à rejoindre comme préalable à
tout soin possible la question des « droits de l'homme ».
Il faudrait même aller beaucoup plus loin, dans le sens du respect de
tout ce dont l’homme est donateur ou légataire, et d’un ensemble beaucoup plus
vaste dont, assurément, s’il en partage la substance, il n’en est ni le centre
ni le maître. Ces questions pourtant n’étaient pas les premières de mes
recherches.
Mes préoccupations ont toujours été médicales, et l’on est parfois
affligé que la question des « droits de l'homme » ait besoin
d’être énoncée au préalable des soins, tant elle devrait aller de soi : La
médecine, pourrait-elle être autre que « humanitaire »?
Les déclarations, pourtant, çà et là, côtoient
l’hypocrisie: Que l'incurie des uns ou la violence des autres provoque des
victimes, et l'on délègue une cohorte de psychologues pour consoler les
survivants ! Un mésusage des psychologues viendrait alors occuper la place de
la « véritable justice ». Car quel peut être le rôle des
psychologues, quand dénier l'évènement serait un comble, qu’être victime n'est
pas une maladie, et qu'une réparation ne pourrait venir qu'en impliquant le
responsable?
Et que dire, alors, lorsque
le système est institutionnalisé, lorsque se constitue sous nos yeux une
sorte de « nouvel ordre psy » qui justifierait tous
les « standards », quand « au nom de l’ordre et des
soins par la même opération » comme le voulait le préfet Gasparin en
1838, on donne naissance à cette « chimère » que nous
analysons dans nos textes !
|
Alors même
que l'un et l'autre sont nécessaires, si on les réunit dans une même main toute
puissante, s'il manque la justice, il n'y a plus ni ordre ni soin ! Police et
justice semblent portés parfois à espérer qu’en subjuguant la psychiatrie, ils
préviendraient mieux les délits. Mais en réalité, « la psychiatrie »,
si l'on veut désigner par là « l'ordre des soins »,
ne peut en rien tenir lieu ni de police ni de justice, qu'elles soient
préventives ou curatives.
Mais le
fonctionnement de la psychiatrie soignante a besoin de la justice : Jadis,
dans une société telle que l’était celle de la France chrétienne, l’esprit du
christianisme, autant que sa lettre, étaient un guide et un recours. Mais la
psychiatrie n’est pas le christianisme : Dans notre état de droit laïc,
c’est dans le « droit » que se lisent les principes et les
recours.
Dès lors,
comment une psychiatrie qui entendrait se soustraire au droit, pourrait-elle alors
être reconnue, et aider quiconque? Un tel microcosme de « non-droit
absolu » ne peut être que le lieu de conflits insolubles, abandonnés
tant aux « tolérances arbitraires » » qu’aux
« tyrannies arbitraires ».
Pour
stigmatiser la confusion qui résultait de ce trop coutumier usage, un ami
infirmier me susurrait ce proverbe : « Quand on veut tuer son
chien, on dit qu'il a la rage »!
En France,
quand les circonstances incitent à y reconnaître les manifestations de la
folie, le « Le Droit, corpus juridique », est remplacé par l’expression directe
du « pouvoir exécutif » ayant pour fin - et dans l’urgence,
réelle ou alléguée - l’établissement ou le rétablissement de l’ordre public.
Et le pouvoir de l’État est par nature
et par volonté, plus puissant que n’importe quel autre dans la nation.
l’État est le représentant d’une
« Moralité Publique » ou plus simplement d’une « Volonté
Publique » et soumis aux sources dont il émane.
Une fois la justice écartée, les
agents de la psychiatrie sont donc soumis à deux injonctions de nature
parfaitement différente, et obéissent par priorité à des ordres qui sont ceux -
non pas d’une ordonnance médicale - mais d'une ordonnance préfectorale.
Quel va être alors le destin d’une « ordonnance
médicale » qui, elle, en diffère à la fois :
ü
Par son registre de
« particulier » qui, sans n’être jamais le seul produit de
lui-même, est différent du « général »
ü
Par son registre
organique de « mental » qui est l’outil nécessaire à la
maturation de « la morale de chacun » ?
Pourtant, quelle que soit la
volonté de l’exécutif, elle n’est que peu puissante au regard de La Vie
qu'il lui est plus facile d’ensevelir que de relever.
Toute la question de la psychiatrie est celle des
places respectives des fonctions de l'exécutif, du judiciaire et du médical :
En France, en cas d'urgence reconnue, aucune
fonction n’est au-dessus de la fonction exécutive :
Deux questions au moins surgissent :
ü
Qu'appelle-t-on
urgence ?
ü
La réponse (une
cascade de mesures pré-établie et impersonnelles) sera-t-elle
appropriée ?
|
En Espagne, après le rétablissement de la démocratie, en
1978, il a été reconnu que la justice et le médecin pouvaient avoir un pouvoir
décisionnel immédiat plus puissant que celui du pouvoir exécutif.
[Voir :
ü
« Table ronde du
8 XII 1989 sur la refonte de la législation de la psychiatrie en Espagne en
1978 : « Au-delà des Pyrénées » clic
ü
« Habeas corpus »
et système Psychiatrique français clic
]
L’incidence de ces fonctions – aperçues, saisies et
appelées au cours du temps de multiples façons différentes (sciences
profanes, religieuses, physiologiques, sociologiques etc. – or aucune
science ne reconnaît qu’elle sait tout, quoi qu’on veuille en dire ou en
reprocher) n’avaient jamais atteint numériquement et qualitativement le
poids qu’elle a désormais atteint en notre nation, sinon dans le monde.
Si la médecine et a fortiori la
psychiatrie ont besoin du judiciaire et de l'exécutif de l’État, jusqu’en pour
leur existence même, l’inverse et la façon d'en user, contingente, est propre à
modeler le visage de tout un peuple
De Platon
(Politéia) à Montesquieu (L’Esprit des Lois), d’Hippodame de Milet à Charles
Fourier (Le Phalanstère), nos penseurs n’ont cessé de rêver la Cité :
Une organisation est toujours
nécessaire - dont en dépendra le sort.
Retour haut de page
2.
Etapes et jalons
|
|
|
|
clic
|
|
clic
|
|
|
|
|
|
Moulay
Idriss Zerhoun
|
مولاي
إدريس زرهون
|
|
(Vers
du poète préislamique Imrou’l Qaïs)
|
قِفَا
نَبْكِ مِنْ
ذِكْرَى
حَبِيبٍ و
مَنْزِل
|
|
clic
وزارة
الصحة - مستوصف
مولاي يوسف - الطب
النفس
clic
Le dispensaire Moulay Youssef sous son oranger
|
J’ai rencontré au Maroc, en
tant que médecin-chef en psychiatrie, la diversité des expressions
culturelles...
Heureuse est cette diversité qui
est la vie même...
C’est le fait de la vie de
tendre vers la diversité.
Contrairement à ce qu’on a
parfois fait dire à ce qu’on croyait être une vision darwinienne du monde, il
n’y a pas de plus fort « en soi », car tous ont besoin de
tous.
Plus encore, chacun à sa façon
- de la bactérie à l’homme, jusqu’à chacun parmi ces mêmes entre eux –
s’approche plus ou moins d’un idéal de perfection différent, qui est fonction
de situations différentes, de rapports différents, de besoins différents, de
désirs donc différents.
Le « royaume chérifien »
ne totalisait, pour la « Santé Publique », que quatorze
psychiatres de « formation européenne », et l'on comprendra
que cette situation m’ait incité à une réflexion quant à son besoin de notre
apport.
Les émanations des fleurs d’orangers ont toujours été
recommandées pour leurs effets apaisants.
(Cf. Les
recommandations de Philippe Pinel pour les jardins dans les asiles.)
Ma réflexion s’est penché tout naturellement
sur la compréhension des fonctions d’équilibrations sociales, que l’on
retrouve dans toutes les sociétés, tantôt similaires, tantôt différentes,
mais toujours nécessaires.
Il y a même des constantes parmi les
variantes : Toujours, le religieux, ou un équivalent, y tiennent un rôle
essentiel.
A partir de là, je me livrai à des recherches
particulières sur les cultures arabo- et hispanophones depuis le Moyen
Age en ce carrefour culturel qu’est « l'extrême ouest méditerranéen »,
puis sur l’origine des pratiques et des juridictions médicales dans
monde arabophone, qui fut initiateur en maintes occasions.
Il m’est alors apparu combien
les recherches dans le passé et dans l’espace sont propres à ressusciter en nous
la matière la plus enfouie d’un patrimoine partagé autant que du sien propre.
|
|
Volubilis
|
|
|
|
|
|
|
|
|
|
|
Puis j'ai cherché à
comprendre les conditions de travail si particulières à notre
psychiatrie :
Le travail au
« Centre Marmottan», centre de lutte contre les
toxicomanies, m'a fait réfléchir à certaines lois que je considère
absurdes, dont le paradigme se retrouve partout en psychiatrie : Par la
« loi du 31 décembre 1970 », qui concerne le
toxicomane, celui-ci peut être « déjudiciarisé » de ses
éventuels actes délictueux, c'est-à-dire que ces actes ne seront pas soumis aux
investigations judiciaires, s'il est « reconnu malade soigné pour sa
toxicomanie ».
Naturellement cela peut
inciter l'intéressé à tenter de poursuivre impunément les éventuels délits qui
se rapportent à sa toxicomanie, à condition d'être inscrit dans le registre de
la maladie, et parfois, pour cela, de poursuivre celle-ci.
On constatera que
le nombre des toxicomanes a considérablement augmenté depuis cette date.
En fait, cette loi reproduit d'assez près,
tout en évitant un certain « mélange », l'ensemble de la
situation existante en psychiatrie, qui « déjudiciarise » tous
les actes « commis en état de supposée démence » : Le « fondement
légal » du système est « l'article 64 du code pénal de
1810 » : « Il n'y a ni crime ni délit si l'inculpé était
en état de démence au temps de l'action… ».
Naturellement
tout le reste en découle, presque par nécessité, comme j'essaie de l'analyser
plus loin, à commencer par la fameuse « loi du 30 juin 1838 », fondatrice
des « Asiles d'aliénés départementaux » en France, soit 28 ans
après. On constatera que le nombre des personnes concernées a
considérablement augmenté depuis cette date.
Puis vinrent
de plus en plus fréquemment des « condamnations à une
psychothérapie », en échange d'une peine de prison, par exemple, qui sont, maintenant, souvent formulées par
les juges ! {Voir
anecdote }
Je me suis
donc demandé comment est-il possible de travailler dans de telles conditions.
D'une
manière générale, en psychiatrie, il me semble que les difficultés rencontrées
par le médecin soignant, dans sa pratique, proviennent davantage de « modalités
de prises en charge qui lui sont imposées », lesquelles peuvent
être « pathogènes », que des soins eux-mêmes, pour
lesquels les remèdes et les théories sont maintenant nombreux et très élaborés,
mais doivent être prodigués par un même médecin responsable de l’ensemble
des modalités de la prise en charge.
Ce point est
essentiel pour éviter les cafouillements.
Comme il en
va dans tous les métiers, l’art ne suffit pas : le technicien a aussi sa
place pour poser les indications : Un remède qui est bon ici, en vue de
tel résultat, pourra être totalement déconseillé ailleurs, en vue du même
résultat, ou d’un autre résultat.
Il
n’appartient qu’au technicien concerné de poser des indications en accord avec
son patient. Ni le résultat de la psychothérapie, ni son indication n’ont à
être imposés par une instance non compétente.
Tout
traitement inapproprié est nuisible.
Il en est de même encore de la psychothérapie. Cette remarque ne semble être
jamais formulée. Elle est pourtant essentielle.
On a
l’impression que « le public » -
dont certains juges - considèrent un peu la psychiatrie comme une
émanation du ciel où « Dieu reconnaîtra les siens ». Comment
cela serait-il possible avec la configuration actuelle du système ?
|
Or la
psychiatrie, la psychanalyse, la psychothérapie, comme tout remède lorsqu’il
est inapproprié, peuvent-être nuisibles. Ce n’est pas de consulter le
médecin, ni le psychanalyste ou le psychothérapeute, ni de recueillir son avis
qui sont nuisibles, c’est le remède s’il est inadapté.
L’image
qui nous vient à l’esprit serait un peu celle d’une ablation chirurgicale,
des amygdales par exemple : Pendant longtemps, on a pensé que ces
glandes étaient inutiles, et qu’il était « toujours positif »
de les retirer. On ne l’affirme plus aujourd’hui.
De même,
la psychanalyse n’est pas une entreprise anodine :
Elle
consiste à faire prendre conscience de ce qui est inconscient. Les auteurs se
sont toujours penché sur la très grande difficulté technique de la chose.
C’est, certes, un point important. Mais ils ont peut-être trop négligé d’en
faire connaître les inconvénients, que, de ce fait, le public et les
tribunaux semblent souvent ignorer.
Car
pourrait-on prétendre que l’inconscient est chose anodine, ou qu’il est
impunément malléable à merci ?
Au
contraire, comme tout organe, l’inconscient est un instrument tout à fait
important, délicat et essentiel : de très nombreuses autres fonctions ne
pourraient pas fonctionner sans lui. Toute intervention sur lui est un acte
dont l’indication doit être soigneusement discutée entre le praticien et le
demandeur.
Il est
fort possible que « le recul du temps » apporte un jour
davantage de lumières sur ce sur quoi nous attirons ici l’attention.
|
L’hôpital
de La Salpetrière, haut lieu d ‘approches scientifiques de
l’inconscient au XIX ème siècle.
|
En conséquence de quoi, l'expression « pathologie
iatrogène » - qui désigne habituellement la « pathologie
provoquée ou aggravée par la médecine » - est-elle elle-même largement
dépassée, lorsque, comme ici, ce n’est pas le médecin chargé d’entrer en
relation avec « le supposé patient », qui décide de la
modalité thérapeutique, et pas même si celle-ci s’impose :
Le vocabulaire manque ici pour désigner ici le type de
« iatrogénie » évoqué, car la « contrainte »,
qui devient toujours tôt ou tard médicamenteuse, prend origine soit directement
du préfet, soit d’un médecin qui ne sera pas le médecin responsable, les
certificats de retour étant dans les deux cas adressés à la préfecture.
La recherche spéculative se demandera : « Pourquoi
en est-il ainsi ? ».
C’est une part du travail que nous exposons ici.
Mais la question pratique (à laquelle j’ai essayé de
répondre) qu'il faudrait poser à chaque médecin, pourrait être celle-ci : « Si les tutelles mettaient à
votre disposition exactement tout ce dont vous avez besoin pour travailler, en
lois, en matériel, en personnel etc. que demanderiez-vous ? ».
Quant-à la même question en miroir, posée aux patients,
voire à tout usager potentiel, elle se fait toujours trop discrète.
« La psychiatrie doit être faite et défaite
par tous », écrivait le docteur Roger Gentis dans « Les
murs de l’asile ».
On pourrait alors débattre à partir des réponses à de telles
questions, alors que jusqu'ici les règles ont été dictées avant d'avoir posé
les questions, sinon à quelques dirigeants seulement.
Hommage et
merci soient rendus ici à tous ceux, maîtres et amis, à qui je suis redevable,
collègues, collaborateurs, aides et assistants à titres divers, secrétaires,
patients, pour ce qu'ils m'ont apporté en connaissance et en amitié.
Retour haut de page
Le plus urgent ici nous a semblé être de remettre en
question les institutions et non les personnes. Du fait de l'uniformisation des
institutions, certains attendraient que tous les hommes aient des comportements
univoques.
Mais,
devant la biologie, du fait des dons de la nature, ou des maladies, de
l'ethnie, du sexe, de l'âge, il n'y a que des différences !
Il est
juste alors de reconsidérer certaines distributions : Sait-on que les
besoins en médicaments varient considérablement en fonction de chacun ? ,
et que, même dans les conditions physiologiques, les besoins différent
beaucoup ? , et que, quand une longueur passe de 1 à 2, les volumes qui
s’y rapportent passent de 1 à 8, car un volume croit comme le cube d'une
longueur ?
Cette règle vaut pour l’air respiré, l’eau,
le sang circulant, la nourriture, l'espace occupé…, alors que la matière reste
la même. Ainsi, en définitive, « la médecine relève toujours du
particulier », et la « psychiatrie-médecine de
soins » aussi, bien sûr.
Que valent
dès lors les « égalités » des administrations ?(Cf.
« Des droits
des hommes, de la nature et de la psychiatrie »)
Que vaut la « psychiatrie dogmatique » qui « classe »
« l’inclassable », alors que Freud lui-même, que tout le monde
invoque à tout bout de champ, disait, tel un vrai médecin, que toute la théorie
doit être revue chaque fois pour chaque patient ! Tous les hommes , toutes
les femmes , tous « les êtres » ne sont ni équivalents ni
interchangeables ... Les
Constitutions n'y peuvent rien…
Devant les
inégalités, il faut alors juger des « mérites » et
« redistribuer », en médecine répondre aux très différents
« besoins » en écoutant les « demandes », et en
psychiatrie surtout se garder d’enfermer les personnes dans des catégories
préétablies. (Cf. « Le champ de la demande et
le lit du traitement »).
On aura
remarqué combien les diversités naturelles évoquées sont souvent incompatibles
avec les « cases » artificielles de toutes sortes imposées à
l’individu, et n’ont rien à voir avec les pseudo-diversités de type
« commercial » proposées, sinon imposées, qui ne changent que la
couleur, les accessoires, les prises de courant, simples verrouillages de « fidélisation »…à
une marque ou à un modèle. Alors que les besoins de la vie sont simples,
pourtant, les choses simples (air, eau...) sont de plus en plus confisquées au
profit du superflu, souvent meurtrier.
clic
Les taggs sur la cabine
d'alimentation électrique sont évidemment volontaires
tandis que l’humour ASILE DANGER
de MORT est accidentel.
|
Quant aux causes
de violences sociales, que l’on assimile trop facilement à des maladies
psychiatriques, (Cf. « L’invention
de la psychiatrie ») elles sont, dans un grand
nombre de cas, évidentes : Les cupidités sont souvent entretenues par
les promesses d'images identificatoires manipulées.
On ne peut pas faire à la fois la promotion du mercantilisme
totalitaire et espérer que le crime et la délinquances vont diminuer.
Et il est vain de vouloir réprimer la violence sans s’attaquer aux
causes :
Elles ne
sont d’ailleurs pas toujours directement visibles,
et l’accès à l’indispensable expression « utile » n’est pas
toujours aisé (Cf. ―). On
n’aurait pas voulu que la psychiatrie fût prise dans le
« piège » d’avoir à charge des
maux pour lesquels on se refuserait à toute prévention. Il en est de même
pour toute la médecine, qui par certains côtés, suit l’évolution de la psychiatrie.
Vers 1860,
Henri Dunant avait conçu « la
Croix Rouge», après les horreurs de la bataille de Solferino, pour
protéger la médecine de « l’engrenage » des « violences
de la guerre ».. On serait fort inspiré de comprendre que c’est
maintenant très souvent « en temps dit de paix » que plane
la menace sur nos « possibilités
de soins », lesquels sont pris dans « l’engrenage »
que nous montrons.
Je m’explique : il n’y a
pas de médecine possible sans une sorte de « halte au feu », le
temps de réparer les blessures. En psychiatrie, il en va de même, bien qu’il
ne soit pas tant question de « brancard » que d’un « discernement du champ » qui permettrait de
rendre possible ce que nous appelons dans un texte présenté ici « le
lit du traitement (Cf. supra)». Les démarches « sanitaires
pures » d’organisations comme la « Croix Rouge »
ou le « Croissant Rouge » restent un modèle méthodologique,
par leur désengagement total de « l’ordre guerrier ». De
même, « en temps dit de paix », l’absolue nécessité pour
toute activité à prétention soignante, d’un désengagement total de toute
position partisane parmi les « conflits civils » a de plus
en plus besoin d’être rappelée.
|
Or, bien
souvent, au lieu de réunir les éléments indispensables aux soins,
on impose une « grêle de
contraintes » au nom « d’urgences et de dangerosités », en
fait souvent aggravées par les confusions qui en résultent, et les
« pressions » permanentes ne font que s’opposer indéfiniment aux
soins,
cependant
que, « la justice ignorera les faits » qu'elle déclare « acte
de démence au moment des faits », alors que c'est « l'état de
démence durant une mise en examen et/ou au temps du jugement» (Cf.
« Habeas corpus
et système psychiatrique français ») qui empêcheraient une
personne d'être entendue.
Ainsi dès le
départ, deux étapes nécessaires sont arbitrairement négligées, avec des
conséquences multiples :
Au niveau « des
faits », faute de « jugement », aussi bien que dans
les suites qui découlent de cette absence, dans une institution, la recherche
de « qui » a été, ou sera « agresseur », et
qui est « victime ».
Au niveau « d’un
malade », quand la personne « hospitalisée sous
contrainte » est malade, les questions de savoir « quels
faits » a-t-il commis, et « de quoi » et « comment »
le soigner.
C’est cette «
déjudiciarisation » intempestive et « à priori » qui
a engendré en France « la psychiatrie administrative » que
nous connaissons. En vouant un « culte » simpliste à
« La raison », comme si elle existait univoque, on a jeté un
anathème sur « La folie », comme si elle en était le « négatif ».
La folie est alors devenu le
« joker » de toutes nos ignorances, de bonne ou de mauvaise foi.
Au lieu qu’il n’y ait encore « les croyants et les mécréants »,
il y a aujourd’hui « les non-fous et les fous », mais
le vocabulaire ne veut plus rien dire lorsque le fou est toujours l’autre,
l’incompris, ou l’inaccepté
en l’autre….
Dans la
reconnaissance de Dieu était, fondamentalement, un acte d’humilité envers ce
que l’on ne comprend pas. La même attitude aurait pu encore exister envers
l’adoration d’une raison que l’on admettrait n’atteindre jamais. Mais le piège
n’est-il pas déjà là lorsque l’on ne s’apprête à respecter que ce que l’on
croit comprendre ? Et qu’en dire dès lors que « La raison », c’est
toujours moi et c’est toujours les miens ? La Fontaine raillait :
« ..la raison du plus fort est toujours la meilleure… ! ». Il
serait égal en ce sens d’écrire « …la folie du plus fort est toujours la
meilleure… », mais comment pourrait-on le dire, lorsque ce qui est
appelé folie est quelquefois simplement « …la raison du plus
faible… » ? .En fait, lorsque cette dialectique est à la
dimension d’un Etat, de justice il ne sera plus question. Et les fondements de
la psychiatrie reposent radicalement sur la soustraction à celle-ci des « faits »
dudit aliéné.
Que
penserait-on de qui s’écrierait ouvertement : « A bas la
justice ! » ?. Or la psychiatrie dénie la justice. Mais ici
la chose était tue le plus généralement. C’est pourquoi nous lui avons consacré
ce site. Il fallait que la vraie raison d'être de l'administration fût de
rendre possible « les soins » et que celle du médecin fût
d'être au service du patient... Qu'en est-il exactement ?
Honnie comme
envers de la raison, ce qu’elle n’est pas, pourtant, on a quelquefois
l’impression que la « folie » est devenue une véritable
« passion française ». Nous avons donc cherché à expliquer la
naissance et l’expansion de cette psychiatrie, et à montrer comment tout ce qui
est dit « psy.* » est concerné dans cette évolution, désireux
seulement ici d’apporter notre part d'expérience et de réflexion.
_______________________
Retour haut de page
4. Clôture.
clic
|
|
clic
|
Azrou sous la
neige
|
|
Les services de psychiatrie les plus « séculiers »
de l ’hôpital de Perray-Vaucluse (91360) ont maintenant été
transférés à Paris, Porte de Choisy, dans une tour de huit étages :
Mais la législation est restée la même !
|
____________
Le « psychiatre », doit
respecter les croyances et les coutumes de chacun : Le « Mental »
n’est pas « La Morale » :
Du Nord au Sud du Maroc (Côte
méditerranéenne, Rif, Moyen et Haut Atlas, hauts plateaux pré-sahariens),
et d’Ouest en Est (De Casablanca, « ville atlantique
jumelle de New-york », à
Oujda, qui ouvre sur l’Algérie, vers les routes des pèlerinages
et le Moyen Orient, et administre au Sud le passage vers ce qui était
l’antique « route des palmiers », chapelet d’oasis traversant
le Sahara et menant à l’Afrique
noire), les régions, de même que
les populations et les modes de vie, présentent un grande diversité.
Il est
particulièrement important pour ledit « psychiatre praticien »,
de respecter les croyances et coutumes de chacun parmi tous ceux qu’il
rencontre, qu’il n’appartient pas à l’art médical de chercher à transformer
dans la relation thérapeutique.
La question
acquiert une grande acuité, avec la démultiplication considérable de la
présence, des moyens, et de ce que l’on attend, de toute la médecine en
général, et de la psychiatrie en particulier.
L’assimilation
simple, parfois tentante, de la « morale » au « mental »
- c’est-à-dire de « conjonctions hautement interactives et culturelles »
à un « état de fonctionnement » relevant du particulier, ne
peut mener qu’à une impasse.
Mas elle est si
fréquente qu’il importe de le rappeler.
Hôpital
Moulay Ismaël : service de psychiatrie
|
|
|
|
Vue vers le Palais Moulay Ismaël clic
|
« côté hommes » clic
|
« côté femmes »
clic
|
Hôpital de Ksar
es Souq clic note13
|
|
“ … بحالي بغيتْ
شي نَمْشي أنا “
L’indispensable C.T.M : Un des
gros problèmes pour pouvoir sortir de l’hôpital : Obtenir de
l’administration la « réquisition » qui permettra la prise
en charge du retour tant attendu, à 500, 600, 700 km…
|
|
|
|
|
Depuis le 48 av
Zerqtouni : l’Hal Med V
|
l.a gde
mosquée
|
Boulangerie
|
Le Moyen Atlas.
La neige n’est jamais
très loin dans les forêts de cèdres.
C’est le frigidaire du Maroc.
En apportant la glace
dans des caves, on a faisait des frigidaires.
Et en faisant glacer des
crèmes, on fait des « sorbets » (<= le mot français vient de « chourba »)
|
|
|
|
|
|
|
|
|
|
|
|
|
|
|
|
Plateau pré saharien :
L’eau est tirée du puits avec un seau, puis conservée et
transportée dans des jarres en terre poreuse ; L’évaporation la
rafraîchit et elle ne se corromps pas.
Les lavandières utilisent aussi des « guerba » qui sont
des outres en peau de chèvre.
|
|
|
|
|
|
La traversée de la méditerranée est
riche en questionnements et en enseignements dans les deux sens de la
traversée. Beaucoup de celles qui furent interrogations n’auraient plus cours
aujourd’hui, parce que les différences se sont estompées entre les deux rives
de la Méditerranée. Elles n’en sont peut-être que plus utiles :
Comment un pays de plus de 20
millions d’habitants se suffisait-il de 14 psychiatres sans qu’une grande
multitude de « fous » ne traînassent partout dans les rues, ou
ne fussent confinés dans les maisons ou les prisons ?
Certes, la tranquillité des
campagnes et des villes traditionnelles ne se retrouvait pas partout - à Casablanca
en particulier – loin de là, comme en témoigne la lecture ci-dessous de la
« Rédaction d'Aîni Bennaî » , miroir des
préoccupations psychiatriques de sa mère, le psychiatre Rita El Khayat.
Hôpital El Hank
Il est notable que les trois
évocations dans ces quelques lignes de la « Rédaction » révèlent
avec précision la nature des pathologies les plus lourdes rencontrées par le
médecin ; et analysées dans le livre « La Folie - El Hank –
Casablanca » :
Elles sont relationnelles et repérées par :
1)
L’expression
de la plainte,
2)
la
drogue et
3)
la prostitution.
C’est leur aspect phénoménologique.
Or il se trouve que c’est exactement aussi la même
pathologie que l’on rencontre dans les quartiers dits déshérités en France.
Folie, certes, mais de quel côté ?
Comment nommer avec justesse les
maladies d'une population « rassemblée au titre de la Folie »
mais dont le visage apparaît, dès qu'on l'approche, comme une « expression-symptôme
directe de malaise conjoncturel urbain » ?
C’est à juste titre qu’on a décrié
l’insalubrité des structures existantes, les chaînes et les cellules de
l’hôpital « El Hank » à Casablanca.
Comme toujours en médecine, le
soulagement, au final, est individuel, mais les causes des souffrances,
elles, ne sont jamais uniquement, et souvent peu ou pas du tout d'origine
individuelle, particulièrement dans ce qui est regroupé au titre de la psychiatrie
moderne.
« Le médecin travaille toujours en bout de chaîne »
– ici, dramatiquement, à la fois au sens propre et au sens figuré !
Infra : Le livre du psychiatre Rita El Khayat :
|
|
|
|
|
Aïni, fille du psychiatre Rita El Khayat est décédée
à l’orée de son adolescence.
La « rédaction d’Aïni » témoigne autant de
l’affection d’une mère, que le livre perpétue l’humour magnifique de l’auteur
: « Heureusement qu’il y a encore des marocaines pour écrire
correctement en français ! »
|
Cf. aussi El Hank : les oubliettes des temps
modernes, in : L’économiste, N°330 du 14/05/1998.
Au temps du Protectorat français,
les locaux d’El Hank abritaient les tuberculeux.
Ultérieurement, les structures
furent administrativement dédiées aux malades mentaux, mais pouvaient
aussi abriter des cas relevant purement de la médecine somatique, par manque de
diagnostic, ou manque de lits appropriés.
De tels « lieux d’oubliés »
sont malheureusement nombreux dans le monde, et c’est une finalité de ces pages
web que de montrer ce en quoi la France doit aussi remédier à ses
propres maux.
Hôpital Moulay Ismaël
La médecine pratiquée – ou non
pratiquée – à El Hank relève
dogmatiquement davantage des « nouvelles conceptions internationales »
- et en conséquence aussi d’inadéquations importées - que des bimaristanes
traditionnels (Cf. L'invention de la
psychiatrie) ;
En revanche, les patients de l’Hôpital
Moulay Ismaël – distant de 150 km -
pouvaient aussi y passer un électroencéphalogramme en cas de
nécessité, aucun appareil à l’époque ne le permettant encore dans les provinces
de Meknès et Ksar es souq (= Er Rachidia).
L’hôpital Moulay Ismael , ancien
hôpital Louis au temps du protectorat, recevait en effet de ces deux
provinces, et il n’y avait ni local ni personnel formés à la psychiatrie à
Ksar es souq.
A Meknès par exemple, étaient
régulièrement envoyés les « enragés » en psychiatrie, en toute
connaissance de cause, faute de disposer de service plus approprié : Les
patients enragés mouraient dans les trois jours. La rage ne comporte d’ailleurs
toujours pas d’autre traitement qu’une difficile vaccination préventive qui
doit survenir dès la suspicion d’une morsure contagieuse. Puis l’animal
suspecté d’être vecteur du virus doit être si possible mis en observation et
son évolution déterminera la conduite à suivre pour le patient.
Il y avait un certain nombre d’épileptiques
connus mais peu ou mal traités ou équilibrés au sein de leur famille
souvent très lointaine.
On a vu arriver en psychiatrie diverses pathologies
somatiques en phase terminale, tuberculose hyper-fébrile par exemple,
s’accompagnant de déshydratation et délire, parce que le diagnostic n’avait pas
été fait : C’est alors le « délire » fébrile qui
constituait le premier « signe d’appel » – tout comme en France,
d’ailleurs – à toute époque - il n’est pas rare qu’une «dysphasie »
soit rapportée à des désordres psychiatriques alors qu’elle révèle une
authentique tumeur cérébrale, ou une hémorragie méningée, etc.
Le matériel médical manquait pour
les radiographies et les électroencéphalogrammes, lesquels derniers ne
pouvaient être faits que à Rabat, devaient permettre de mettre
rapidement en évidence une lésion soupçonnée par la clinique.
Mais précisément – et tout comme en
France – les choses ne sont pas toujours aussi simples, et, hormis les
dérèglements à retentissement psychique bien connus, partout en « psychiatrie
vraie, si l’on peut dire », encore aujourd’hui, « l’étiologie »
reste le plus souvent mystérieuse.
Pourtant, ces pathologies ne sont pas pour autant des
« futilités », et l’évolution peut être dramatique et mortelle,
sans que le médecin n’ait la moindre possibilité, en dépit de toutes les
données de la science et de la technique, d’y remédier.
Cette psychiatrie passait donc
d’abord, puis tout au long de la prise en charge, par une préoccupation
particulièrement éveillée des fonctions somatiques connues et accessibles, dont
la psychiatrie n’est d’ailleurs en réalité jamais séparable.
La tendance à une excessive rupture,
entre le réputé somatique et le réputé psychique, est au contraire, à combattre
en France.
Au total, dans les années 1970, le
service de psychiatrie de Meknès qui gérait la psychiatrie des provinces
de Meknès et de Ksar es Souq, soit une population de 500.000 habitants,
comprenait moins de 100 lits pour les hommes, et moins de 100 autres pour les femmes
et les enfants.
Les problèmes propres aux langues berbères ou dialectes des
régions éloignées étaient généralement résolus par une répartition judicieuse
du personnel infirmier. Néanmoins persistaient parfois des incompréhensions
linguistiques, et comme partout, des cas de « mutisme »
toujours bien énigmatiques : Il n’est pas toujours possible de savaoir si
un mutisme est pathologique ou non – entendant par là : volontaire ou non.
C’est en général l’aide des autres sens - gestuels et mimiques qui parlent –
qui renseignent. Mais ce n’est pas toujours le cas, et j’ai bien des souvenirs
de cas où nous avons passés des heures de jours et de nuits à essayer seulement
de communiquer, d’autant que, en médecine, il arrive toujours un moment où tout
devient urgence – urgence de plus en plus urgente – avant qu’il ne soit trop
tard.
Bien qu’en psychiatrie le langage
parlé soit loin d’être le seul mode d’expression, un mutisme inexpliqué peut
résister au meilleur interprète.
Naturellement au Maroc il aurait été – et resterait - mal
venu de plaquer directement des pathologies importées de la nosographie
occidentale moderne. Par exemple, il serait difficile d’appeler « hallucinations
auditives » le fait qu’un patient « entende » - voire
« converse » avec - des « jnouns (pl. de djinns) »
tant le fait peut être banal et culturel.
La remarque vaut aussi en France aujourd’hui pour beaucoup
de patients « altéro-culturels », en me permettant l’emploi de
ce néologisme.
La remarque que « toute pathologie a quelque chose
d’ individuel » reste d’ailleurs toujours valable, là comme ailleurs.
La psychiatrie européenne était,
sinon mal connue, du moins difficilement directement importable, dans ses deux
dimensions : Celle des « internements administratifs » et
celle des « nouvelles pratiques ».
C’est ce qui m’a amené à réfléchir
plus profondément ensuite à sa genèse en France dans un contexte de laïcité
très spécifique.
La police marocaine utilisait à tort
les « internements administratifs » comme on le fait en France,
mais avec beaucoup moins de moyens, si bien que « la sortie »
du patient qui était parfois domicilié à plus de 400 km (de Meknès =>
Ksar es Souq (Rachidia) => Erfoud, => ou même au-delà vers le Sahara)
nécessitait la « réquisition » d’un billet de « car »
via la Compagnie des Transports Marocains, la CTM, qu’il fallait se battre pour
obtenir de l’administration et pouvait devenir le principal obstacle à une
sortie.
On remarquera qu’en France la Police
agit exactement de même en assurant le convoyage de l’entrée, mais pas de la
sortie.
Par ailleurs, on avait du mal à assurer un suivi médical des
personnes incarcérées en prison.
Quant à la population, elle était presque radicalement
divisée en deux parts, sans dépendance directe avec le niveau social : Les
adeptes des pratiques européennes et les traditionalistes. Parfois le passage
de l’une à l’autre part survenait
successivement.
Les traditionalistes utilisaient les médecines
traditionnelles et/ou religieuses, et se tournaient vers les « fqihs »
ou même les sorciers : Les fqihs appuyaient leurs pratiques sur le
Coran. Mais les sorciers au contraire utilisaient des pratiques magiques
parfaitement interdites par l’islam :
Autant les « neuroleptiques » qui inondent
aujourd’hui la planète entière étaient inconnus des médecines traditionnelles,
autant celles-ci n’ignoraient en rien – déjà - les « maladies
mentales » et plus facilement par excès que par défaut !.
L’entraide était généralement bien
développée, sous l’égide de l’islam ou de valeurs familiales ou claniques, mais
le rejet aussi se rencontrait.
On sait que l’institution du « tuteur » est
prévue dans le Coran (Mohammed rassoul Allah était orphelin)
jusque pour les déficiences mentales profondes. Dans ces conditions, personne
n’était rejeté ou abandonné.
Les populations non
traditionalistes, c’est à dire « européanisées », évidemment
en général citadines, au contraire venaient consulter le psychiatre européen ou
européanisé, plutôt en consultation externe, spontanément, souvent avec une
confiance souvent presque sans limite, ce qui est souvent le cas aussi des
vrais nécessiteux en soins psychiatriques en France : Les plus malades
sont alors les plus dociles, et étant données les éventualités d’inadéquations,
deviennent facilement les plus victimes.
En France aussi, ceux qu’on appelle
« malades mentaux », c’est à dire plus exactement « ceux
que l’on psychiatrise / ou que l’on a psychiatrisé / et qui le restent »,
me semblent généralement bien plus « dociles » que la moyenne
de la population générale; fait, en l’occurrence, jamais relevé. C’est pourtant
mon impression personnelle : C’est aussi ce qui m’a aidé à comprendre la
fonction de « pharmacos » (« bouc émissaire humain»
chez les Grecs de l’Antiquité) fonction que je développe ailleurs. Ce n’est
cependant pas toujours le cas ; et alors, s’ils se rebellent, ne serait-ce
qu’en gesticulant pour éviter une injection, on a tôt fait de le dire « violents ».
Ainsi, au Maroc, pour les uns le
psychiatre n’était qu’une dernière extrémité alors que pour les autres, il
était l’avenir d’un progrès attendu.
Le Maroc est depuis longtemps un
carrefour humain et culturel d’une diversité considérable : On estime
aujourd’hui la population composée à 50% de berbérophones et à 50%
d’arabophones, mais les origines des populations sont en réalité beaucoup plus
complexes que les données linguistiques : Les Romains s’y sont
installés, les Vandales l’ont traversé, les dynasties « almoravides »,
venues du Sahara, unirent pratiquement le Delta intérieur du Niger
aux Pyrénées.
« Le grand Maroc » historiquement, a été ouvert à
la fois vers l’Afrique sub-saharienne, l’Atlantique, le Nord
de la Méditerranée et, vers l’Est, jusqu’à la vallée du Nil. Les
travaux récents sur l’ADN (travaux de Gérard Lucotte) semblent confirmer
l’homogénéité ethnique des Berbères, des Touaregs, des Libyens
de l’Antiquité et des habitants du Delta du Nil. Mais c’est
surtout depuis la naissance de l’islam qu’il est aussi une porte ouverte
sur le Moyen Orient : L’islam et la langue arabe ont véhiculé les apports
de la Perse et par elle de l’Inde, en musique, littérature,
mathématiques et astronomie, et même connu la Chine (Cf. « Les
mille et une nuits », et – infra – les voyages d’Ibn Battuta).
Ces apports ont gagné l’Europe via
l’Italie et, surtout, la péninsule ibérique.
La toxicomanie :
La toxicomanie
n’est pas un phénomène nouveau dans l’histoire de l’humanité, mais son
développement actuel à grande échelle est concomitant de structurations
nouvelles du mental chez beaucoup d’être humains.
Il est
vrai qu’il existe aujourd’hui une conjonction réunissant :
Mais dans tous les cas, il resterait
vain, dans un but thérapeutique, de s’en remettre :
Comme
pour bien d’autres états, et souvent de ceux qu’on appelle « maladies »
– et pas seulement mentales – on pourrait dire que la toxicomanie est déjà une
recherche de guérison.
Mais, mal
orientée, elle mènerait au ratage.
Paradoxalement, ce que recherche le
toxicomane n’est pas « une extase de plénitude », mais « la
symbolisation d’un manque ».
Le toxicomane tente inlassablement
de remettre en scène une opération qui aura échouée –afin de la réussir enfin
- dans laquelle la fonction de « l’agent
de la symbolisation » tenait une place centrale.
C’est pourquoi les diverses
attitudes du toxicomane reproduisent si étrangement les affres d’un impossible « sevrage ».
C’est pourquoi aussi, « une
addiction », dans son sens le plus large, se substitue volontiers à
une autre – comme on l’observe tous les jours dans la vie courante : (« le
manque » serait alors l’insaisissable l’objet d’une insatiable
recherche).
Traditionnellement,
au stade de l’enfance, c’est par la mise en place de la « fonction
paternelle », que « l’agent de la symbolisation »,
« fonction maternelle », se détournant de l’enfant, devait lui
permettre l’accès à la « symbolisation du manque » (par
exemple et fondamentalement celui du « sein nourricier » en tant
que partie de l’enfant – dès lors qu‘il relaie « le placenta »).
« L’objet - sein »,
au départ pure appartenance au « réel » de l’enfant et de ses
besoins, devient ainsi, ensuite, aussi, représentation « symbolique » de
ce qui n’est pas lui, soumis à la puissance de la mère, et dont l’enjeu peut
mettre en péril jusqu’à la vie du nourrisson.
Au registre du « besoin » s’ajoute
alors celui du « plaisir », issu des gratifications mesurées
de ce qui devient « don », de puissance et d’amour.
Sur « le mécanisme de la
symbolisation », on lira avec profit le séminaire de Jacques Lacan
« La relation d’objet » (1956-1957).
Tous les médicaments ont des effets
indésirables, souvent multiples. « De deux maux il faut choisir le
moindre ! ». Il n’y a aucun produit miracle.
Mal employés, les médicaments
peuvent aller jusqu’à produire l’effet contraire de ce pourquoi on aurait voulu
les utiliser.
Les neuroleptiques, eux sont
généralement des « ralentisseurs de neurone ». Ils
ralentissent « les passages à l’acte », mais ils ralentissent
aussi son contrôle, et la réflexion.
Enfin, tout médicament inutile est
nuisible.
Un idéal impossible :
Ici, quelques remarques que l’on pourrait longuement
développer: « Etre ou ne pas être « équivalent » ? :
Mais les constitutions ne restent pas sans effets :
Effets trompeurs :
On peut placer ici les remarques suivantes :
Du « démuni d’argent » au
« démuni d’esprit » :
Voici en quels termes notre poète Rutebeuf
(1230-1285) évoque la vilaine apellation de « fou » au milieu
du XIIIème siècle : (d’après le texte établi par Michel Zink) :
Populations
africaines :
l est probable aussi que l’on remettra un jour en cause
beaucoup de ce qu’il est convenu d’appeler « l’histoire officielle » :
Par exemple en retrouvant, grâce à l’archéologie, la linguistique, l’A.D.N. ,
ce qu’ont pu partager les habitants de la « Vallée du Nil » et
ceux des « Vallée du Niger » (Futa Djalon,
Tombouctou, Djenné), et « du Sénégal », lesquelles communiquaient, il n’y a pas si
longtemps, grâce à l’espace, alors verdoyant et animé, devenu aujourd’hui
« Sahara » :
Depuis sont apparus des travaux passionnants dont rendent
compte des livres. Citons :
(2006) Christiane
Desroches Noblecourt : « Le fabuleux trésor de L’Egypte »
(1990) Théophile Obenga :
« La philisophie africaine des pharaons »
(2006) Bernard Lugan :
« Histoire de l'Afrique », livre dans lequel il propose comme
étymologie du mot Sénégal, deux noms de tribus berbères connues
au Maroc : Zenatas ou Snadjas.
(2006) Martin Bernal
(Anglais) : « Black Athéna » en 3 gros volumes comencés
en 1987. Le titre est volontairement provocateur et faux car la déesse est
originaire de Saïs dans le Delta. Le volume 3 (de linguistique)
paru en 2006 n'est pas encore traduit en français, mais on y trouve l’origine
égyptienne des mots Odysseus (Ulysse) Sparta, Hilotes, laconique,
etc.
Différences entre
« croyances » et « registre symbolique » :
Cf. Jacques Lacan, le 16 Mars 1955 ,
in : « Le séminaire livre II »
Chapitre XIV « L’imaginaire, le réel et le symbolique »,
Éditions du Seuil 1978, page 193 :
« … Marcel Gnaule a fait rapidement allusion à l'islamisation d'une
partie importante des populations du Soudan, au fait que celles-ci
continuent à fonctionner sur « un registre symbolique » tout
en appartenant à « un style de credo religieux nettement discordant
avec ce système ». Leur exigence sur ce plan se manifeste d'une façon
très précise, par exemple quand ils demandent qu'on leur apprenne l'arabe,
parce que l'arabe est la langue du Coran.
|
Le voyageur Ibn Battuta (Tanger
1304 – Marrakech 1369) parcourut le monde, de la vallée du Niger à la
vallée du Nil , et jusqu’à la Volga et la Chine.
Invité en Inde à assister à un
cérémonial, dans lequel les jeunes veuves de guerre indiennes se jetaient
dans les flammes, il s’évanouit.
Si les mœurs qu’il découvrait le
troublèrent à ce point, il n’en reste pas moins que le fonctionnement mental
de ces femmes, qui se jetaient d’elles-mêmes dans les flammes, refusant même
de se voiler la vue, ne témoignait, pour autant, d’aucune pathologie.
|
|
Le nouveau nom a été choisi en l’honneur du prince Moulay
Rachid, fils cadet du roi Hassan II, père de l’actuel roi du Maroc
Mohammed VI.
Le mot « qsar » figure encore dans
l’ancien nom de l’hôpital – tel que lisible sur cette photo : « moustachfa
qsar es souq » (écrit selon le mode marocain ancien avec 1 point
sur le « q » et 1 point sous le « f »).
« qsar » traduisait, comme dans beaucoup
de régions pré sahariennes, le mot de langue amazighe « Igrem »
(= village fortifié ).
|