1)  Évolution  de la « dé-judiciarisation »   des  « domaines  contrôlés par la psychiatrie »

 

 

suivi de :

 

 

2)  Quelques  considérations sur « les rapports de la justice pénale avec la psychiatrie » clic

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3.                 Fin du tableau

4.                 Conclusion

5.                 Fin de page

6.                 Fin des notes

 

1)  Évolution  de la

 

« dé-judiciarisation »   des « domaines  contrôlés par  la psychiatrie »

 

de  la  fin  de  l’ Ancien  Régime à nos jours

 

Interprétation :

Les couleurs  montrent que partout où ce qui était en vert est devenu en mauve ou en jaune, c’est que la justice a disparu, au profit de l’exécutif direct ou de la psychiatrie sous son contrôle :

Il apparaît clairement ne serait-ce qu’au vu ‘un aperçu rapide des couleurs vertes que l’Ancien régime était beaucoup plus riche en formulations judiciaires, et d’après les couleurs mauves que l’époque moderne abuse d’exécutif pur.

 

Légende :  En mauve ou entouré de mauve, les préoccupations mises en évidence.

 médical

Bleu

Présence rare quantitativement

Et qualitativement subjuguée par l’administratif.

administratif

 

jaune

Sous obédience préfectorale

judiciaire

 

Vert

1.      Absente pour les jugements des déments.

2.      Absence dans les procédures d’internement (En Espagne elle peut s'y opposer)

3.      Présente pour les Curatelles et les Tutelles

4.      Présente seulement après-coup, pour les demandes de libération, sorte « d’habeas corpus a posteriori » (contraire à l'esprit de  protection de l'habeas corpus de la « Common law » qui protège avant !)

 juridico-administratif

Citron-vert

Les intendants de l’Ancien Régime

 « dé-judiciarisé »

En « italique » et/ou entouré de Mauve

1.      En 1810 pour les actes des supposés déments.

2.      En 1838 pour les enfermements des personnes

3.      De plus en plus, sans enfermements, sans autorisation, pour les traitements infligés aux personnes, comme dépossédées de leur corps (non conforme à la Constitution de 1958)

 

 

De l’Ancien Régime à 1789

Révolution

Consulat

Empire

 

Monarchie de juillet

 

Epoque actuelle

 

 

1.

DEJUDI-

CIARISA-TION

Des crimes et délits

DROIT DE GRACE

NAPOLEON

1801 : Rétablissement du droit de grâce, mais sans valeur judiciaire .

 La « grâce présidentielle » est devenue obsolète pour la peine de mort après 1981.

Jugement possible de toute personne soupçonnée de délinquance ou crime.

NAPOLEON

CODE PENAL de 1810 (art. 64)

Impossibilité de jugement si la personne est déclarée « démente au temps de l’action »

puis :

Impossibilité répétée dans le Nouveau CODE PENAL de 1992 (Commentaire de l'article 122-1 du CP de 1992), en ajoutant une « punissabilité » (?) non précisée.


2.

ACTEURS

voir

page I-3/6

1. ÉGLISES, SEIGNEURS, MONARQUES et PARLEMENTS, en position de juges.

JUGES

Loi du 3 jan. 1968 : Juge 1. des tutelles ,  2. des curatelles

et 3. curieuse Sauvegarde de justice : Fonction judiciaire du médecin.

2. INTENDANTS : Rrôle judiciaire et administratif.  (Supprimés en 1789)

 

 

NAPOLEON

1800 : Par la loi du 28 pluviose an VIII : Création des PREFETS  (exécutif pur)

3. « DEMENTS » confiés à la « direction » de « maisons  spécialisées » et des MEDECINS « délégués » chargés d’ y dispenser les soins requis.

Ces médecins deviendront ALIENISTES, puis NEUROPSYCHIATREs, puis PSYCHIATRES après la loi de 1970

 

3.

 

PRIVA-

TION des

DROITS CIVIQUES

Privation des droits civiques pour des causes non spécifiques

NAPOLEON

1804 : CODE CIVIL

  1. Interdiction
  2.  Conseil judiciaire

 

Loi du 3 jan. 1968 :

 

 

1       Tutelles 

 

2       Curatelles

PROTEC-

TION et GESTION

des BIENS

 

 

Loi de 1838 :

(de 1838 à 1968) « Administration provisoire légale commune »

 

.         

3       Sauvegarde de justice :  Curieuse protection prononcée par le médecin traitant

1)   permettant d’annuler des actes

2)   avec quelques effets dépénalisants

3)   et non privative de droits civiques.

 

 

4.

PRIVATION

de

LIBERTE

PHYSIQUE

sans crime

ni délit

Anciennement :

justice royale 

 

1.

 

JUSTICE

DELEGUEE   ROYALE  :

(peu utilisée pour les aliénés)

 

 

LOI DU 30 JUIN1838

 

de 1838 à 1990

 

LES PLACEMENTS PREFECTORAUX

LOI DU 27 JUIN 1990

Votée « pour 5 ans » mais reste en vigueur

 HOSPITALISATIONS SOUS CONTRAINTE PREFECTORALES

En plus, au XXI s. :

 

LOIS DES

5 JUIL 2011 et 27 SEPT 2013 :

 

Soins sans consentement à personne en :

 

« PERIL IMMINENT »

 

 (art.L. 3212-1 du code de la santé publique)

 

Plus seulement

 

HOSPITALISATION, mais plus généralement

 

 

SOINS PSYCHIATRIQUES

 

Sans demande de tiers, mais avec :

 

a)     un certificat

d'un médecin non-exerçant dans l’établissement dont

 

b)      le directeur

devient signataire

2.

 

JUSTICE RETENUE ROYALE : 

dont les lettres de cachet : Ce type de justice a été supprimé en 1789.

Il deviendra en 1838 :   

1.      

PLACEMENT D’OFFICE (PO)

 

par mouvement propre du préfet

1.

HOSPITALISATION D’OFFICE (HO)

 

Le préfet reste un arbitre unique

2.

PLACEMENT VOLONTAIRE (PV)

 

a) par demande d'un « tiers » (ni préfet, ni etc.)

 +

b) tout certificat médical  (de médecin non-traitant datant de moins de 15 jours. )

+

c) dossier à la préfecture :

2.

 

HOSPITALISATION A LA DEMANDE D’UN TIERS (HDT).

 

a) par une demande civile

+

b) multiplication aberrante  des médecins (non-traitants) signataires de certificats

+

c) dossier à la préfecture

 

La supposée médecine est devenue réglée par le timing du chronomètre administratif

 

5.

MEDECINE simple

 

Progressivement , depuis 1922 :

SERVICE LIBRE.(SL)

27 juin 1990 :

Changement d'appellation :
{3}.HOSPITALISATION LIBRE (HL)

Mais passages de (SL) avec [1] et [2], puis, après 1990, de (HL) avec {1} et {2}, dans les deux sens, et dans les mêmes locaux, avec les mêmes équipes soignantes et les mêmes dossiers médicaux.

 

 

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4.      Conclusion

5.     Fin de page

6.     Fin des notes

 

 

______________

 

 

2)  Quelques  considérations sur « les rapports de la justice pénale avec la psychiatrie »

 

                                   I.     INTRODUCTION  à la  QUESTION  de l’appréhension du sujet des  SANCTIONS PENALES  par la  PSYCHIATRIE

 

Comme celui de toute médecine, l'espace occupé par la psychiatrie devrait être « le plus limité possible », au mieux même elle devrait « ne jamais avoir à soigner » mais seulement rester disponible, et d’usage avant tout « prophylactique » tant il est toujours vrai que « Mieux vaut prévenir que guérir »

 

Toute prévention résulte d’un enseignement, et c’est l'une des tâches les plus importantes du médecin que d'enseigner, mais cet enseignement est de deux types : Il y a l'universel, qui sera le théorique, celui de l’hygiéniste et il y a le particulier, celui qui concerne un patient unique, et diffère toujours à quelque degré de l’universel, pour de multiples raisons.

 

-        Pour un instituteur, le particulier de son enseignement de l’universel est dans son adaptation à l’élève.

-        Pour le médecin soignant d’un patient le particulier est non seulement dans l’adaptation de son dire au patient, mais aussi dans la chose enseignée, particulière à celui à qui elle est destinée.

-        Pour le médecin légiste, il n'y aurait ni particulier ni enseignement à l'endroit d’icelui.

-        Mais pour le médecin psychiatre légiste, bien qu'on n'entende guère cette expression plutôt remplacée généralement par le mot expert, [peut-être parce qu'anticipant ses conclusions, existe chez le locuteur une idée préconçue de « sortie de la loi » ],  du fait de l’extrême et ni visible ni objectivable particularité du sujet en chaque personne concernée, ces considérations (d’adaptation et d’enseignement) sont d’autant plus inapplicables au sujet qu’on les voudrait profondes de vérité.

-         Le particulier pour l’exercice du juge tient dans les circonstances d’un acte, dans lesquelles s'inscrivent les particularités du ou des acteurs. (NB : La formule « au moment des faits » des lois dépénalisant l’aliéné ou dément depuis 1810 jusqu’à nos jours, est insuffisante puisque, à la différence d’un acte supposé ponctuel, le temps de l’acteur n’est pas celui de cette punctitude.

 

A priori, il n’y aurait aucun terrain commun entre la justice et la psychiatrie, puisque la psychiatrie est destinée à soigner ou prévenir des patients et des maladies, et n’est pas chargée de juger; que son terrain est dans le patient et ses particularités, éventuellement reconnues pathologiques et éventuellement encore appelant des soins, alors que la justice pénale au contraire est chargée de juger, en des personnes physiques ou morales, saines ou non, des actes - c’est à dire des productions d’une personne ayant eu des conséquences extérieures à elle - en tant que fautes ou au contraire à déclarer justes, à l’aune de nos lois, de notre culture et de nos conventions – car quand bien même un droit serait dit naturel, c’est par sa reconnaissance qu’il devient juridique.

Dans ces conditions il n’y aurait pas l’une « ou » l'autre, de la médecine et de la justice, mais l'une « et » l'autre, sur des terrains différents.

 

Pourtant il arrive que selon nos lois

-        les terrains s'excluent

-        ou que la justice justifie par la psychiatrie ses déjudiciarisations

-        ou encore que l'exécutif ordonne directement des contraintes par psychiatrisation.

Dès lors, au prix de fonctions soignantes dépréciées, les rapports de la psychiatrie ont pris une importance démesurée, avec :

-        d’une part la justice par le statut déjudiciarisé de l’objet de ses soins 

-        et d’autre part avec l’exécutif par les contraintes par psychiatrisation qu’il ordonne.

De tels assemblages mènent à des situations que l’on pourrait appeler d’opportunités « méta-psychiatriques » en complet déni de justice , déclaration arbitraire des besoins et déni d’une direction médicale de soins.

 

La  construction historique a engendré après la Révolution de 1789 des classifications nouvelles, en rupture avec celles de l’Ancien Régime, dont les registres n’existent en partie plus, en particulier du fait de la fonction directrice qu’y avait tenu le christianisme, laquelle a été défaite non pas tant parce qu’on n’en voulait plus, mais pour s’approprier ce qu’on en pensait être ses avantages (et parmi eux, métaphoriquement et paradigmatiquement, « les biens du clergé »)

Le renoncement aux théologies de l’âme profana la conception des êtres, mais si désormais l’Homme fonde le droit, pas plus qu’on n’avait entendu les mots de Dieu, on aura entendu ceux de l’Homme.

Avec ou sans raison, on vit naître en revanche des maladies nouvelles, nostalgies de l’âme, états de Romantisme, et désespoirs manifestés sinon sous des formes nouvelles, du moins en nombre exacerbé (suicides, toxicomanies, desperados, etc.…)

Les états seconds conjoncturels (guerres, névroses) ou recherchés comme refuges - élitistes puis popularisés, puis facilités, peut-être encouragés - ont crée des endémies toxicomaniaques et des états dans lesquels prédomine la confusion mentale, entremêlant les genres, que l’on ne sait plus ou ne veut pas démêler.

Les infirmités avaient toujours été le lot de nos existences, mais le nombre d’aliénés en France n’était estimé qu’à moins de 3000 en 1789 (Cf. François Olivier-Martin (1879-1952) : « Histoire du droit français des origines à la Révolution » - 1948)

Aujourd’hui les états psychiatrisés se comptent  par millions en Europe.

 

En quoi la psychiatrie est-elle concernée par les situations pénales ?

L'état psychiatrique d’un sujet dépend de deux fonctions qui se conjuguent tout au long de son existence.

La première est instrumentale et ressortit d’abord de la physiologie et l’on peut la dire pour ainsi dire mentale d’origine.

La seconde est le résultat des interférences de la première avec ses mises en conditions externes et internes multiples et modulables et chacun la connaît sous le nom de psychique.

Parmi les points de rencontre possibles de la justice et de la psychiatrie, distinguons :

 

A.    LES LOIS ET LE SYMBOLIQUE : Pour la maturation appelée couramment mentale du sujet, c'est plus précisément par cette seconde fonction, psychique, que ledit sujet devra accéder à l’ordre symbolique, acquis grâce à la compréhension des lois de définitions (de la nature et des hommes) lesquelles ne sont pas spécialement la justice ni de celle-ci les peines [1]

 

B.     LE RESPECT DES TEMPS PROPRES DE LA JUSTICE : Dans le champ de la justice, la psychiatrie n’a rien a dire de ce qui est condamné ou condamnable, et, exactement comme toutes les autres parts de la médecine, c'est surtout pour la cause précise qu’est l’exécution d’une peine résultant de la condamnation d'un acte (condamnation à laquelle il n'est pas pensable que la psychiatrie ait le moindre devoir de s'opposer) que le psychiatre a lieu d’être sollicité afin de dire si une peine peut être ou non utile et supportable, ou inutile ou franchement nuisible à la santé d’un patient.

 

C.    LES FAITS : Mon point de vue de praticien soutient le plus clairement qui soit l'abolition des lois soustrayant quiconque a failli, à la reconnaissance de l’existence des faits qui lui sont attribués.

 

D.   LES CIRCONSTANCES : Dès lors la question des circonstances (atténuantes, aggravantes, etc.) si importante en justice, peut-être traitée exactement de la même façon en psychiatrie que dans les autres domaines : Ainsi , du domaine médical peuvent émerger des circonstances atténuantes, allant jusqu’à une déresponsabilisation totale, et dans ce cas pour la psychiatrie, c’est le mental actuel (instrumental [2]) qui devra être pris en considération in fine (voire infra) Bien sûr le mental apparaît par les manifestations qu’il produit, mais ce qu’on devra en retenir ici sont des manifestations, qu’il faut savoir reconnaître, bien différentes de la psychologie, allant dans les cas extrêmes jusqu’aux démences dites vésaniques.

De même en médecine ordinaire on appréciera des atteintes précises et non une maladie susceptible de les produire. Il ne faut pas confondre les noms et les choses : Il en va de même pour le doute qui a un intérêt s'il porte sur des possibilités précises.

 

E.     LES RESPONSABILITES : Je ne m’attarderai pas ici sur la question des responsabilités collectives, qui peuvent être indivises ou partagées (en examinant chaque fois les parties des responsabilités et les parties de la collectivité)  ces questions étant les plus anciennes, elles nous paraissent les plus simples.

Les questions de la responsabilité individuelle d’une faute, doit d’abord considérer la correspondance de la faute avec l’acteur qui l'a produite, qu’il faut donc dès lors séparer dans l'analyse.

Une question relativement nouvelle est : « S’il y a folie à un moment, peut-on être responsable soi-même de sa folie ? »

Traditionnellement la réponse était comme entendue « Naturellement « non ! »

La réponse aujourd’hui est bien entendu : « Oui, c'est possible ! » comme le prouve manifestement la prise inconsidérée de psychotropes à cette fin.

La question devient celle de la personnalité et de ses instances méta psychologiques, qui mettent en cause celle-là , et sont le soi, et la maîtrise de soi.

La réponse était traditionnellement non, du fait du type de vie collective que l’on avait, d’une part chacun étant considéré comme une personne engendrée et générée par ses parents (proches et lointains) avant d’être elle-même, et d’autre part  chacun veillant sur l’autre.

Les anciennes études de causalités invoquaient comme responsables soit le destin, soit de façon caractéristique après 1943 (Autisme de Kanner) la famille et surtout les parents (incriminés par Kanner) et surtout la mère (responsable de la non résolution du complexe d’Œdipe, tirant l’exemple pathogène de Jocaste dans la tragédie de Sophocle. J’ai abordé la question du père – restée alors relativement intouchable de ce point de vue - dans mon mémoire de psychiatrie des années 1980 sur les pères pathologiques (i-e pathogènes) Aujourd’hui, les familles s’étant encore appauvries en parents, on se tourne de plus en plus vers un « soi-même cause de lui-même »  en attendant les auto-engendrements, clonages, etc. qui ne manqueront pas de survenir[3].

J’ai également abordé brièvement le sujet sous deux aspects plus généraux  : a) aspect philosophique : Un choix de dé-responsabilisation  et b) aspect légal : Différences entre la « judiciarisation des hospitalisations sous-contraintes » et la « Non-déjudiciarisation des malades mentaux »

 

F.     UN JUGEMENT : Tout fait étant reconnu comme tel, l’auteur de l’acte qui est désigné et reconnu, doit être condamné, non pas en fonction de ce qu’il est supposé en comprendre, mais en fonction de ce qu’il est désirable qu’il comprenne. Le premier devoir de la justice est donc de l’exprimer clairement et en totalité.

 

G.   L’APPLICATION D'UNE PEINE : Enfin et c’est surtout au titre de l’application d’une peine supposée correspondre aux faits de la faute, que se pose la question de l'opportunité de la sollicitation d’un avis psychiatrique, du fait d'un état sanitaire particulier, lequel en psychiatrie commence par la question de l’identification par lui-même - totale ou jusqu’à déniée - de l’auteur désigné au personnage physique qui en porte l’identité légale, pour se poursuivre dans toutes les nuances de sa personnalité particulière, de son évolution depuis avant, puis après les faits, entre ceux-ci et le jugement, au moment du jugement, et enfin possible ou prévisible selon les diligences apportées.

 

H.   ↑ retour  -  EN CONCLUSION :

 

Rappel :

 

Il convient d’analyser, dans un tel sujet, les besoins d’abord et leurs solutions données ensuite, que notre société a pris soin de répartir en fonctions. La question de leur convenance sera alors appréciée à l’aune de leurs résultats. L’analyse des résultats n’a évidemment de valeurs que si les principes énoncés sont réellement appliqués.

 

Ces principes ensemble et réunis ont été établis  dans un contexte de cohérence reconnu traditionnellement sous l’appellation de religion (ce qui n’implique d’ailleurs pas l’existence d’un ou de plusieurs dieux, mais seulement des hommes et des générations) mot sur le sens duquel déjà Cicéron s’interrogeait en évoquant le verbe latin religare, relier. D’autres mots sont équivalents et l’important résulte de leur contenu. Mais la question ici n’est pas celle d’un vocabulaire toujours imparfait sinon, à dessein ou non, trompeur.

 

La spécialisation en fonctions découle et implique la séparation des pouvoirs et autorités, mais toutes se complètent et chacune a besoin des autres, à la condition qu'aucun ne s’approprie le domaine d'une autre, et remplisse pleinement sa fonction dans le cadre de sa déontologie.

C’est dans ces conditions que si un système social ne fonctionne pas ou plus ou mal, il convient de le transformer en sachant que chaque changement dans une fonction engendre des conséquences dans le fonctionnement de toutes les autres.

 

Ainsi, les fonctions judiciaire, médicale (que la psychiatrie est) et étatique sont actuellement impliquées, et chacune en plusieurs temps :

1.            Il est demandé à la psychiatrie une fonction possiblement soignante, et jadis une appréciation de responsabilité qui a désormais disparu des « questions » à la psychiatrie posée, mais parfois des fonctions prédictives, auxquelles il est évidemment impossible de répondre.

2.            La justice elle travaille en quatre temps, qui sont la reconnaissance des faits, le jugement , la condamnation ou non  et occasionnellement l’application d’une peine.

Le respect de ces temps permet une certaine souplesse évolutive des applications.

3.            Le ministère de l’intrieur enfin et par délégation les préfectures et d’autres institutions ont un pouvoir décisionnel sur la psychiatrie qui ne va pas jusqu’à une appropriation de fonction, mais engendre souvent de dommageables injonctions.

4.            Notre propos revient à souligner le rôle initiateur de la reconnaissance des actes – bien avant tout jugement moral, transcendant et civilisationnel, question qui n'appartient en propre à aucune des fonctions ici concernées - et dont nous avons voulu développer ailleurs les déplacements historiques – limitations sans lesquelles n'est pas même possible aucun des temps susdits dans lesquels la psychiatrie est sollicitée.

 

1.    Place et type de la justice.

La justice a besoin de cohérence et d’énonciations claires, tant dans ce qu’elle reçoit que dans ce qu'elle émet. Cette nécessité de rigueur et de discrimination deviendra d’autant plus forte que nous entrerons dans l’ère des intelligences artificielles, robots et clones, qui ne manqueront pas d’entrer de plus en plus en rapport avec les questions tant de médecine, mental et psychisme, que juridiques, dont celles des responsabilités. 

 

Durant la révolution de 1789 il fut un moment où les juges furent élus par le peuple, et non soumis à une nomination tutélaire.

Il existe en effet de nombreuses conceptions possibles de la justice.

Notre peuple entend ne s'occuper que de la justice humaine, seule mais en totalité, c’est à dire de ce qu’elle entend comme relevant par ses causes ou conséquences des actions humaines ou même naturelles, affligeant les personnes de communautés qu’elle contribue en cela à définir, etc.

De plus, pour nous, la justice est une émanation démocratique de son peuple, auquel elle est destinée à rendre possible une vie commune en accord avec sa définition du bien.

Le but ultime de la sanction pénale est de tendre vers un bien public, de le faire connaître et de le faire respecter, grâce à des jugements dont les sanctions (sanctifications) peuvent être alors autant des justifications que des condamnations. L’idéal serait que chacun en toute sincérité, de l’ensemble du peuple à l’unanimité, puise souhaiter « Que justice soit faite ! » ,  que la justice soit préventive et n’ait idéalement qu’une existence désœuvrée. Mais la réalité est que son rôle est également réparateur, la réparation devant à son tour acquérir une fonction sociale prophylactique, seule raison pour laquelle elle peut être en rapport avec la psychiatrie, dans une dimension que, probablement à tort, ne saurait prendre en compte la médecine dite ordinaire, pour cause de réputée incompétence.

 

2.    Singularité de la médecine.

Parmi les particularités du sujet, on reconnaîtra d’abord que le juge comme le médecin oeuvrent à la disposition du public, mais leur ouverture au public, sans s’opposer, sont opposées, en ce que le regard du juge est téléologiquement tourné vers la communauté, alors que celui du médecin l’est au contraire vers un patient. De plus, il est à remarquer que la médecine est née d’un  type de pratique singulière, dans le sens où elle est distincte de celle du bien des autres, lui est strictement incomparable - et plus encore dans une dimension psychique que dans tout autre -au point que tout un savoir tiré de la nature et non des lois, puisse légitimement - et presque ou peut-être en entier - être remis en question dans chaque cas.

 

Enfin de ces deux remarques résulte la situation cruciale que l’expert-médecin ne travaille pas dans ce qui fait l’essence de la fonction du médecin, au risque d'engager pourtant radicalement celui qu’il examine dans une possible aventure thérapeutique.

C’est cette particularité qui, en accord avec l'éthique médicale commune qui est la notre, et fait passer la pratique et son éthique avant une théorie, impose que celui qui recommande un type de soins donné soit aussi celui qui propose de s’engager à s’y impliquer responsablement (implication que par suite d’un ineptie intellectuelle, malgré un désir avoué de soigner (Esquirol) la législation des internements psychiatriques a interdit depuis 1838)  :

 

3.    Limites des expertises. 

L’expertise psychiatrique – dont une médiatisation si particulière à notre époque et dont le public est devenu avide (médiatisation difficile à visée à la fois unificatrice et diversifiante – je voudrais éviter  « divertissante » !) –  non seulement ne résume pas les rapports de la psychiatrie avec la justice pénale, mais même est, si on entend dans ce rapport « le compte rendu objectif du fonctionnement mental et psychique d’une personne » (mental, psychique et personne, 3 mots différents que je m’applique en d’autres pages à essayer de définir) relève de l’impossible.

Aucune objectivité - que l’on voudrait dégager du sens du curieux mot « expert » (du latin « ex + peritus de perior, periri » voir ce mot [4]) n’est pensable ici comme permanence  ou valeur détachée d’une « relation unique » (1° par ses protagonistes 2° par ce qui résulte de  leur rencontre en un lieu et son temps)

 

Le psychiatre, pas plus que quiconque, expert ou non, n’a le pouvoir de « deviner » les conformations inconscientes d’aucun, les fantasmes à celui-ci lui-même cachés ou ses intimités pulsionnelles secrètes, l’opérateur disposa-t-il pour cela de quelque sérum de vérité, d’une intelligence sans limite, robotisée ou non, voire de moyens puissants ou cruels.

L’oniromancie n’a pas sa place ici, et quant à la psychanalyse, elle nécessite une situation particulière aménagée à cette fin, exigeante et laborieuse, et résulte avant tout d'un engagement (presque un combat) du patient, suivi d’un résultat incertain. De façon rédhibitoire enfin, par les définitions mêmes du contrat qu’elle exige, elle n’a évidemment aucune place dans les expertises à l’usage des tribunaux.

En ce sens encore, on sait que l’expertise médicale à des fins judiciaires ne délivre pas le médecin de ses devoirs déontologiques, ce qui est heureux car ici comme ailleurs un brouillage des genres ne pourrait engendrer qu’une dérive totalitaire fonctionnellement stérile.

 

Une telle expertise étant impossible, on ne peut introduire ici sous ce mot « expertise » que « l’expression d’une aptitude médicale d’un expert à se projeter dans un engagement thérapeutique, hypothétique mais précis, de lui-même »

La justice pourrait dès lors accepter, rendre possible et favoriser, au prix de précautions, une telle mise en œuvre, et sa vertu d'autoriser les soins deviendrait utile - au contraire d’une imposition de soins en vérité impossible ou d’avance vouée à l’échec, de ce fait.

 

Une telle position tire sa valeur de sa réelle possibilité de mise en pratique si elle est réclamée, par suite du fait important entre autres qu’elle ne comporterait aucun conflit d’intérêt, car sans valeur marchande ni pour un patient  ni pour un soignant qui n’est pas le bénéficiaire des soins qu’il prodigue et de la guérison qui peut en advenir.

Rappelons ici que les conflits d’intérêts sont fréquents dans les mises sous tutelle imposées, lorsque la tutelle dépend de l’organisme soignant (hospitalier par exemple) et ces conflits peuvent entraver considérablement les soins.

On remarquera ici que l’expertise en médecine légale somatique d'une personne in vivo ou post-mortem (et ce n'est pas par un rapprochement de hasard puisque « soma » signifie « cadavre » en grec,  comme « corpse » en anglais – mot que cette langue a retenu du latin « corpus ») travaille aussi avec la loi, mais en foi d'une place et d’objectifs totalement différents : On y voudrait considérer le corps de la personne sous ses aspect mécaniques purs - ce qui en fait une difficulté (pretium doloris) - en tant que matériau fait de substance qui détermine un jeu de possibilités ou impossibilités allant jusqu’à celles de produire des mouvements et des actions. Mais les actions possibles ne sont pas en elles-même ce que le droit appelle des actes, parce qu’elles ne s’inscrivent pas dans un champ de responsabilité, lequel n’est reconnu qu’à l'instance qui commande ces mouvements ou actions.

 

4.    Les deux sources de la responsabilité.

En systématisant, on voit que le mot « irresponsable » a deux sens dont on distingue mieux les champs dans les sens positifs du mot qui est « responsable » : C’est ce double emploi qui explique l’emploi de l’expression populaire injurieuse « c’est un irresponsable ! »  à l’endroit de quelqu’un dont la responsabilité en droit est pourtant reconnue et le rend coupable :

 

1er)                    Le premier sens est fait de la reconnaissance d’une capacité déférée (dite dans un sens très particulier « morale ») en raison de compétence et/ou de nomination (explicite ou tacite) dont l’attribution peut être retirée.

A cela correspond alors l’irresponsabilité par retrait de la compétence, ou pour caducité ou comme sanction et punition, etc. L’appréciation de ce 1er sens du mot peut être pénale et relever alors de considérations purement juridiques (s’il en était) à tous les niveaux d’une procédure allant jusqu'à un jugement ou non.

 

2e)                       Le 2 eme sens du mot, est l’incapacité d’une personne à assumer ladite responsabilité déférée, du fait de sa défaillance matérielle, invalidité, etc. qui peut apparaître évidente ou être seulement décelable par un médecin.

Depuis et du fait de la triste séparation de la neurologie et de la psychiatrie en 1970, les déficits instrumentaux affectant les fonctions mentales instrumentales ne relèvent généralement plus, pour la plupart, de la psychiatrie : Tels des troubles neurologiques passagers (épilepsie) ou réguliers (de veille/sommeil) ou permanents (hormonaux, tumoraux, vasculaires) etc. qui sont considérés comme relevant de la médecine, générale ou spécialisée (neurologie, endocrinologie, oncologie, etc.) La compétence officielle des experts psychiatres en est affectée.

 

3e)                       Très différemment de ces 2 types d’irresponsabilité, les désordres proprement psychiques de nature idéiques qui ne résultent pas d’altération des instruments mentaux (lesquelles renverraient à l'instrumental) appartiennent à la catégorie que j’ai traitée tout en haut dont l’expertise a priori est impossible.

 

On touche ici à l’ineptie, sinon la perversion d’avoir presque réduit la psychiatrie à de la psychologie en la séparant de la neurologie en 1970 :

 

o       Dans le champ de la médecine, les conséquences sont multiples

o       Dans les tribunaux, l’éventualité d’une déresponsabilisation pour des raisons psychologiques seules, indépendamment d’actes ou d’atteinte instrumentale, serait un terrain particulièrement dangereux pour les libertés de pensée.

-           

Le thème que je me suis donné ici, d’énoncer quelques aspects médico-juridiqiques de la personne humaine, s’étend de la maturation de l’enfant aux états de délinquance, et ses éléments demeurent toujours les mêmes : Ils relèvent toujours de la symbolisation objectale, et non d’une causalité mécanique conçue sur un modèle stimuli-réponses.

 

La vie juridique de la personne humaine étant reconnue comme faite d'une succession d’actes (de l'acte de naissance – sinon depuis d'autres bien antérieurs -  à l’acte de décès, etc.) la signification sociale de la justice dans ceux-ci doit donc être comprise d’une part par tout un chacun concerné, et réciproquement par ledit lieu de l’autre.

Si le justiciable ne comprend pas le contenu d’un dit dialogue occasionnel avec la justice parce que l’incompréhension ne relève que de lui-même, alors toute aide appropriée peut et même doit (moralement) être sollicitée : Mais le travail d’un agent, qui en l’occurrence peut être un psychiatre, n’est possible que dans une situation aménagée à cette fin, c’est à dire réunissant :

1) Un désir si mince soit-il, et une demande émanant de l'intéressé,

2) et l'énonciation claire du message qu'il lui est proposé de comprendre.

Cela implique que la justice énonce ce qu'il serait souhaitable que le justiciable comprenne in fine, c’est à dire exactement ce qu’il mériterait « normalement » (punition ou encouragement) en tant que personne responsable en fonction de faits et circonstances en totalité précisés.

Alors un but peut être défini, seule façon d’appréhender l’objet d’une relation concrète et motivée entre un soignant et un soigné, même si une telle relation pourra ensuite dépasser l’enjeu ponctuel de la sollicitation.

Mais un tel dépassement vague et hypothétique ne doit pas se substituer à un moindre en apparence, précis et limité qui en est le « prétexte » occasionnel et peut en subsumer le tout.

Un apprentissage d’un code sans message n’aurait aucune raison d’être.

Tel me semble être ce qui doit être préservé de la compréhension de la présence de la psychiatrie, avec la définition médicale que nous lui en conservons, dans son rapport avec la justice pénale.

 

_______________

 

 

                               II.     ↑ retour   Sur  les  TRAITS  de  la  PSYCHIATRIE  FRANCAISE  et  ses  BESOINS

Pur outil et procédure, contrairement à une religion pérenne, la psychiatrie n’est attachée à aucun message. Par contre, par l’importance même de l’outil qu’elle est, au service de nombre d’appréciations arbitraires et humaines au sein de son lourd appareil, la psychiatrie tend incontestablement à imposer la diffusion de l’idéologie du pouvoir au moment, au détriment de son ouverture à l’expression de quiconque dont elle prétend s’occuper.

On attendrait : 1° : Un détachement du pouvoir, tel qu’on peut l’attendre d’un service public rendu au public, mais qui n’est pas un service de l’état rendu à l’état et  2° : Une responsabilisation de chacun des acteurs : de ses actes propres, seuls mais entiers.  Tels sont les deux préalables que requiert une fonction soignante au service de l’intimité de chacun.

 

A.   ↑ retour   HISTOIRE  et  ANALYSE :

La psychiatrie française est née de la Révolution de 1789 - et peut-être est-ce vrai aussi d’autres parmi les dites psychiatries dans le monde, en y incluant même certains systèmes qui n’en portent pas le nom, mais relèvent aussi du même système relativement simpliste qu’en une autre page j’ai détaillé.

Comme nos philosophes des lumières l’ont énoncé, l’une des premières tentations de tout pouvoir est l'abus ; et de là découle la théorisation de Montesquieu sur la séparation des pouvoirs.

Dans le cas de la médecine, le sujet prend d’emblée une dimension métaphysique existentielle [5], quelle qu'en soit la part dans chacune de ses partitions, car la médecine est une, en tant qu’elle occupe précisément la place et la fonction vitale qu’on lui reconnaît encore dans nos sociétés.

Le système psychiatrique français est loin de se limiter aux simples supposés soins prodigués à un état psycho-mental particulier de chaque réputé aliéné : Il tend à étendre sur toute une population (Circulaire du 15 mars 1960 sur la sectorisation) un principe de conformité à ce qui est déclaré être La raison (arraisonnement de principe) sans pour autant en définir le contenu - avec raison puisqu’elle est en vérité multiple et changeante (je l’expose en une autre page)

Il ne faut pourtant pas confondre un culte et ce qu’il contient, et encore, produit : Les cultes énoncés de l’Etre Suprême ou de la Raison épelaient un nom, voire une ambition, mais non pas son contenu, inaccessible.

Les philosophes ne manquaient pas, mais si ceux des Lumières ont certainement contribué au déclenchement de la Révolution, aucune des subtiles pensées philosophiques n’aura été capable de faire la part, eu égard à ce qui s‘appelait l’aliénisme, entre : 1) Des aides et des soins qu’il fallait prodiguer (en quantité très limitée en ce domaine à l’époque) ; 2) Des recherches dont le terrain était largement en friches ; 3) Et l’arbitraire auquel il fallait mettre fin [6] , tous domaines pour lesquels la théorie de la séparation des pouvoirs aurait du constituer les bases législatives[7].

Finalement aujourd’hui :

1) Par son ubiquité, la psychiatrie n'est pas en rupture avec les débats autour de la conception de l'homme dans l'Ancien Régime - débats dont les excès tragiques ont de tous temps fabriqué les guerres de religion ;

2) Mais par le monolithisme de son dessein et la fusion de ce simili-religieux retenu avec l’exécutif de l’état  la rupture avec les principes de l’Ancien Régime est complète, car contrairement à ce qui se dit ou croit peut-être, l’exécutif de la monarchie et le religieux étaient toujours restés totalement distincts.

En effet, si la psychiatrie aujourd’hui tient du religieux par formalisme et par appellation (psychè) , ce n'était pas encore le cas de l'aliénisme (alienus = autre) : Le vocabulaire ici conserve tout son sens.

 

Enfin, dire que la psychiatrie est issue de la Révolution ne veut pas dire qu’elle en porte les messages (il y en eut plus d'un !) : Elle en est issue mécaniquement et de plus la préfecture entend se soustraire à toute idéologie.

Pourtant, étant un bras exécutif, il importerait de savoir à quelle injonction répond l’exécution.

La psychiatrie n’est ni le message libertaire de 1789 ni le message terroriste et totalitaire de 1793.

Elle ne sera pas non plus le message du Code Civil ni celui du Concordat napoléonien qui n’ont prescrit que de se débarrasser du sujet (CP 1810 Art. 64 : « Il n'y a ni … ni... »)

Elle défendra finalement de facto clairement l’ordre bourgeois de la Monarchie de Juillet, sa mise en forme définitive n’ayant eu lieu que par la loi du 30 juin 1838 créant les asiles d'aliénés départementaux, alors que le sort en était jeté et devenu inévitable dès le Code Pénal de 1810.

Il est impossible de dire si le fait a été pensé et voulu, ou s’il a seulement résulté du laisser-faire de quelque chose qu’il aurait fallu éviter.

Une conséquence mécanique en effet peut ou non se produire suivant qu’on la laisse se produire ou réussit à la maîtriser.

 

B.    ↑ retour   IDEAUX

Le séisme révolutionnaire avait ébranlé ou détruit la France mais aussi influencé l'Europe et dans de grandes parties du monde les croyances des temps de l’Ancien Régime et leurs conséquences politiques,

Mais des absences de croyances laissaient un manque dans l’ordre des valeurs.

L’originalité de l’ordre nouveau, au delà d’une simple tolérance, est qu'il est devenu lui-même un objet de vénération de valeurs et de croyances nouvelles en instaurant des lors les bases d’un ordre public qui s’en trouvait bouleversé.

Or, à défaut d’une prétendue religion, des principes communs sont nécessaires à la survie de toute société : La laïcité (1ere déclaration de 1795) qui se voulait vraiment neutre – exactement comme le symbole d’égalité – a alors été choisie pour en tenir lieu, en oubliant qu’elle n’était qu’un opérateur. En faisant de l’opérateur le sujet de l’opération, au second degré de l’abstraction donc, la laïcité elle-même avait maintenant besoin d’une prêtrise pour assurer ce qui était devenu son culte, mais lequel était – (par définition nouvelle: voir infra) - celui d’un « opérateur de messagerie laissée vide »  :  La psychiatrie allait donc en assumer la prêtrise et les rites, pour concrétiser l’abstraction.

Mais qu’est-ce à dire ? Les places des affiliés ne pouvaient devenir que celles d’un numéro d’un espace personnel privé , lequel donc ne devait plus appartenir à la vie publique.

Ce n’est pas seulement de l’humour que de dire qu’il n'y a pas de plus radicale issue à la protection que d’en metaphoriser l’autisme par un enfermement de chacun – sorte d’anaphylaxie (surprotection) psychologique.

La messagerie devait tomber mathématiquement entre les mains d’un ordonnateur. Elle fut abondamment remplie au point de désormais déborder.

Mais où est passé l'idéal sinon dans les rites - ce qui s'appelle fétichisme, dont les désignés patients font les frais ? On ne peut y voir que des procédures, au nom de l'ordre public, des soustractions, aux lois, des contraintes et des certificats. Et de fait, il n’y a pas lieu d’en imposer davantage : On peut bien « croire à la laïcité » ce qui est une confiance, une disposition, mais non pas « croire en » puisqu’elle ne contient pas de dogme.

 

C.    ↑ retour   L’ORDRE PUBLIC :

Tout le monde cite cette phrase d’Aristote : « L'homme est un animal politique » .... (son maître Platon était royaliste et son disciple Alexandre devint pharaon)

La « polis » (cité) était une triple unité : de  1) lieu, 2) peuples, 3) lois :

C’est dans cette « polis » (polis cité engendre  => politès citoyen) qu’est née la démocratie athénienne (démocratie limitée et élitiste) et c’est son organisation qui servait à Aristote d’argument en faveur de la démocratie car, dit-il, tous pouvaient se connaître et chacun savoir pour qui il votait (à la différence des grands empires orientaux)

Et c’est cette « polis » dont déjà la France de Philippe le Bel - et déjà dès avant lui - a voulu faire son nouveau modèle : « Paris sera la nouvelle Athènes ! »

(et cf. « L'attentat » au pape Boniface VIII à Agnani en 1303 : Ambition de pouvoir, en vertu de ces éternelles tendances abusives d’emprise entre des fonctions pourtant irréductiblement hétérogènes que j’appelle, en raccourci, paternelle et maternelle en une autre page [8] )

Dès lors, c’est le politique qui fait le citoyen, en tant que partie d’un « ordre public », c’est-à-dire « laïc » (public = λαικος , laïc) en son sens fondamental (λαος = le peuple au complet)

Cet ordre est déjà au temps de la monarchie celui de notre « chose publique » tel que l’énonce avec précision Jean Bodin (1530-1596) : « Le roi est tuteur et curateur de la république »

A coté des acquis du christianisme (« Rendez à César ce qui est à César et à Dieu ce qui est à Dieu ») , tels ont été forgés et conservés les fondements de nos institutions.

Mais on a tort aujourd’hui de confondre demos et laos : Ainsi un enfant, n’étant pas citoyen, ne fait donc pas partie du démos. Mais il fait cependant partie du laos. 

On a eu tort également de laisser prendre au mot « laïc » - qui encore au Moyen Age (on l’écrivait « laiz ») signifiait « non clerc » mais pas « sans religion » - un sens antinomique de « religieux » et finalement le sens de « croire ne pas croire » dans le champ sémantique du religieux, ce qui en a fait de facto en France de la laïcité cette 4 eme religion, de présence obligée dans tout colloque de rencontres des trois autres, monothéistes (judaïsme, christianisme et islam) reproduisant ainsi une division, tout comme celles qu’elle était censée éviter. Certains glissements sont ainsi insidieux.

 

D.   ↑ retour   LA SANTE :

Mais en fondant l'Aliénisme, ancêtre et peu différent de la Psychiatrie moderne, Esquirol, par la loi de 1838, a voulu introduire et poursuivre deux buts par une même et unique opération : Le placement en asile d’aliénés , pour la gestion de l’ordre public et des soins aux personnes.

Ces deux gestions, aussi nécessaires l’une que l'autre, sont-elles possibles par la même opération? N’est ce pas là poursuivre une chimère ?

L’idée de soins aux personnes part d'un besoin individuel (à fortiori versus psychisme) , alors que l’idée d'ordre public part du besoin de la gestion d'un collectif.

Et nous affirmons que loin d’être nécessaire, cette aporie est destructrice à la fois de l'une et de l'autre gestion - et même des registres de l'une et de l'autre.

De ces deux préoccupations découla (tardivement) l’idée d’une sorte de hiérarchisation : Groso modo, Liberté de la demande d’hospitalisation en cas d'absence de dangerosité pour autrui, et privation de liberté par contrainte dans le cas contraire - généralement suite à un acte grave déjudiciarisé – sorte de prix à payer pour la faute - mais ce premier temps n’est pas nécessaire.

En réalité, finalement, ces deux modalités de soins voulues totalement différentes ont lieu dans les mêmes lieux, avec les mêmes équipes et les mêmes dossiers : Il n"en résulte que de la confusion : Une sorte de suspicion devant une demande libre, des passages de l’une à l’autre forme, dans les deux sens , comme un système de punition/récompense, difficilement compatible avec la nécessité première en cas de désordre psychique, laquelle est toujours de symbolisation : des personnes, des fonctions, des actes, etc. 

Tout commence ici par les reconnaissances. C’est-à-dire que, pour un matérialiste (et in fine quelle différence reste-t-il entre matérialiste et spiritualiste ?) tout est question de connexions, mais dont on ignore pourtant à peu près tout de la nature et du lieu (qui s’est déplacé au cours des siècles du cœur vers le cerveau en passant par le foie et la rate (Théorie des 4 éléments) et des humeurs aux neurones, et aujourd’hui aux hormones, neuro-hormones et neuro-médiateurs.

Lorsque le désordre est au contraire franchement mental, ce qui prend ici dans mon vocabulaire le sens d'instrumental, il n’existe pas ces difficultés liées à la désignation du soignant, mais les hôpitaux psychiatriques sont alors mal adaptés car dès lors l’affaire est réputée ne plus être psychiatrique, mais neurologique, endocrinologique, oncologique, etc. et les communications se font mal sous la surveillance préfectorale entre les spécialités médicales (alors qu’on ne cesse de parler des rapports entre prisons et psychiatrie)

Ce qui est l’occasion de redire les méfaits de la loi de 1970 car les causes de ces disfonctionnements sont souvent reconnaissables mais faute aux conséquences de cette loi sont parfois non reconnues.   

Enfin, la saine doctrine de la séparation des pouvoirs entre justice et police, encore respectée en 1838, a disparu en 1990 : Transmission des dossiers.

Remarquons que la généralisation récente de l’expression « prise en charge » évoque trop un fardeau en écartant trop l’idée de légèreté (spirituelle) qui serait de bon aloi entre personnes libres (médecin et soignants) et du but annoncé (guérison) de la thérapie.

Mais c’est le « sur-poids » administratif qui l'emporte au long cours, désormais sur la totalité du champ médical, alors que les pressions infligées par les administrations (policiers mais aussi commerciaux) sur les résultats attendus n’ont toujours que des effets négatifs, comme de « fermer les lumières pour faire regagner les caisses … »

En ces sens déplorables, la psychiatrie n’a malheureusement pas fait pas figure d’attardée, mais de précurseur !

 

Selon la formule consacrée et conforme à la fonction du préfet, l’internement est motivé « Au nom de l’ordre public et de la sûreté des personnes »

Mais ici, la formule devient maladroite lorsqu’il s'agit de faire entrer une personne particulière dans le domaine médical des soins qui seront individuels :

Si ce que la formule appelle la sécurité des personnes désigne celles qui restent libres et que l'aliéné est la cause supposée du danger, l’invocation de l’ordre public suffit.

Et si la formule voulait aussi protéger un aliéné elle dirait la sécurité de LA personne puisque l'ordonnance est celle de son placement.

[Ou bien alors - et c’est anecdotique - j’ai vu être internée une famille en son entier (père, mère et fils) au prétexte qu’il y avait une dispute familiale à laquelle la préfecture entendait ne pas se mêler ni prendre parti et que seul un médecin psychiatre pourrait comprendre !]

 

Finalement donc d'emblée le préfet prononce une ordonnance de privation de liberté – en principe d’une personne et de toute façon il y aura un dossier par personne - qui est d'ordre policier : Or, celui d'une garde à vue d’une personne malade dans un hôpital doit être assurée par un policier et non un infirmier. C’est le cas dans un hôpital normal.

C’est pourquoi la récente formule verbale d’hospitalisation sous- contrainte est choquante et reste en parfaite contradiction avec la forme, qui ne laisse apparaître dans un hôpital psychiatrique qu’un personnel appelé soignant. 

 

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                          III.     ↑ retour   REMARQUES GENERALES  sur les relations entre la  PSYCHOLOGIE  et la  BIOLOGIE ( GENETIQUE  SOMATIQUE  et  GENETIQUE  SEXUELLE) dans la SOCIETE et les INSTITUTIONS.

 

 

A.    Il y a une relation entre l'absorption du religieux par l’exécutif, de la santé par l’ordre public, du droit par le pouvoir, à toutes les échelles, jusqu’aux remaniements imposés des rôles dans les familles.

Dans tous ces cas, c’est l’imposition, par la puissance du pouvoir, de l'ordre le moins différencié, à la celui de la discrimination des tâches, des fonctions, de leur intelligibilité, etc.

(Ainsi les égalités proclamées des rôles des deux parents aboutissent fallacieusement à des assimilations à des identités, malgré les différences évidentes du fait de la biologie, etc.

Ainsi la décision d’avortement qui en délaissant les circonstances (externes et internes si l’on peut dire) de la procréation, les différentes étapes de la grossesse, etc. , ignore finalement : L’existence du père dont l’enfant et ses annexes sont pourtant formés par 50% de son patrimoine ; les hormones fœtales (troisième personnage) et leurs effets sur la mère, etc.) 

 

B.     Sociologiquement, la régulation de la reproduction est celle qui est à l’origine de toutes les institutions et elle reste le paramètre prévisionnel décisif de l’avenir d’une société.

Un taux de natalité est variable mais un sex-ratio naturel est constant, c’est à dire d’environ 50%. Mais la composition qualitative des couples est laissée libre par nos institutions. Elle ne l’est pas toujours par les lois de certaines communautés. Enfin, la langue n’est pas déterminée par la diversité génétique, mais le langage est fortement lié aux fonctions, lesquelles le sont au sexe etc.

 

C.    La génétique quant à elle joue deux rôles  bien différents dans le façonnement de la société, et cela par ce qui se joue dans la durée :

a.     La transmission des chromosomes somatiques assure une hérédité de dimension familiale c'est à dire une continuité d’un type biologique donné (multiplié par le nombre d’enfants d’une même fratrie) dans le long terme

b.     Tandis que l’autre au contraire, par la transmission des chromosomes sexuels décide de qui sera père et de qui sera mère, simples fonctions, pour ainsi dire occasionnelles et éphémères à l’échelle d’une société envisagée dans le long cours de la continuité sus-dite.

 

Au total, biologie , psychologie et fonctions sociales sont toutes impactées par les apories de décisions des administrations même prises « en toute ignorance de cause » ou « faisant mine de l’ignorer » (ainsi par exemple des demandes (récemment en 2022) de prise en compte des menstruations, mais ignorance feinte ou réelle des effets de la biologie hormonale [9] sur la psychologie [10] d’une mère, différents (et en partie opposés) en début, milieu et fin de grossesse, pourtant connus depuis la nuit des temps.

Les apories, dans des domaines très différents, indépendants entre eux (tels langage et génétique), ou non,  sont toutes susceptibles d’engendrer des effets dommageables sur les équilibres des  populations.

 

 

 

Fin de page

 

 

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9.     Fin du tableau

10.   Conclusion

11.  Fin de page

12.  Fin des notes

 

 

 

 

 

Notes de bas de page :

 

 



[1] NOTE : Ordre du symbolique, physiologie comportementale et addictions :

Un prototype des mécanismes de la symbolisation dont l’enjeu est immédiatement apparent est le sevrage du nourrisson.

L’essentiel est sans doute dans la capacité du dit agent de la symbolisation d’en assumer la fonction que  je ne développerai pas ici. (voir toxicomanies)

Dans la vie ordinaire, il n’est nullement habituel de devoir théoriser une situation si banale qu’elle est familière. On comprendra qu’en clinique, en revanche, si la médecine peut ou doit être sollicitée pour des états occasionnels, le principe de la guérison de ces compulsions pathologiques que sont les addictions ne relève pas que de l’absorption de médicaments qui pérennisent les motivations de la recherche dans la mise en scène de l’alternance de la plénitude et du manque, et tiennent au mieux un rôle d’objet transitionnel, mais bien des investigations, et investissements nouveaux des intimités personnelles particulières.

 

 

[2] NOTE : Mental et psychique : Depuis quelques années j’essaie de systématiser notre langage qui reste aujourd’hui assez nébuleux dans le domaine de la psychiatrie.

J'en suis arrivé à appeler mental la fonction instru-mentale et, différemment, psychique l’idéation qui en résulte :

1) Ainsi le mental (mot issu du radical men-  des langues indo-européennes) serait un instrument de l’organisme résultant d’abord de données natives héréditaires et d’autres interactions (en réalité, la fécondation d’un ovule est déjà un jeu d'interactions) et donc antérieur à la plupart des acquisitions personnelles, mais naturellement chaque organisme est déjà unique dès sa naissance.

2) j’appelle alors psychique l'ensemble des idéations (conscientes et inconscientes) qui résultent du mental et de toutes ses interactions. En lui est le champ de notre libre arbitre. Naturellement il y a sans cesse des interactions entre le mental et le psychique.

3) Pour le comprendre en simplifiant, on peut faire une comparaison avec la maladie : Une maladie tire ses particularités d’une cause dominante mais même sans pouvoir avoir accès directement à la cause, on peut la suspecter d'après des symptômes plus ou moins spécifiques qu’elle produit : fièvre, inflammations, tachycardie, torpeur, etc.

De la même façon, le psychisme serait à l’origine une production symptomatique, qui pourrait être elle-même révélée par d'autres symptômes, alors secondaires. Il est labile (par exemple durant le sommeil), plus ou moins facilement modifiable, accessible à chacun par le jeu du je de lui-même, et la volonté qui en résulte, etc.

L’outil mental est automatisé et inconscient. Mais il est accessible à la connaissance par sa dissection ou par ses conséquences, etc.

 

 

[3]  NOTE : Les artifices : La question de la responsabilité des mécaniques artificielles a été longtemps différée mais une réflexion s’impose à ce sujet : Cette responsabilité que l’homme aurait jadis ravie aux dieux, sera-t-il  amené un jour à la déférer à ses propres productions mécaniques ?

Par sa nature fictive la responsabilité peut être incarnée de mille façons différentes, déplacée, partagée, transmise, imposée, retirée, voyager, etc.

La question prégnante est celle de sa représentation.

La question collective peut revenir à celle de l’accord plus ou moins démocratisé d’une représentation humaine ou quelconque.

La question individuelle concentre pour ainsi dire le sujet dans sa quintessence dramatique. Mise en scène depuis les religions de l’Antiquité, elle a été particulièrement mise en scène  par les tragiques grecs Eschyle, Euripide et Sophocle.

Le voile de l’artifice du personnage a été soulevé par Mary Shelley (1797-1851) dans le roman Frankenstein peu avant ce qui deviendra le déferlement cinématographique.

La responsabilité est une affaire morale qui nécessite deux supports, l’un physique et l’autre intellectuel. Cette dernière qualité difficile à mesurer a reçu l’élégante réponse de Binet :  « L’intelligence c’est ce que définit mon test » mais l'une comme l'autre peuvent être artificielles.

La responsabilité est dite morale si elle est  déférée et partagée, dans le cas des banques ou des gouvernements, et elle pose la question de la légitimation. Mais ces mêmes attributions concernent aussi bien toute responsabilité individuelle.

La supériorité des performances intellectuelles artificielles sur les performances humaines n’a fait que se confirmer, et l’un des plus récents témoignages en a été la performance de l’ordinateur Alphago qui a remporté la partie de jeu contre son partenaire coréen en 2016.  Suivie mondialement en direct, la surprise de la partie a été le coup 37 qui paraissait débile aux plus chevronnés, mais devait finalement apporter la victoire à l’ordinateur 174 coups plus tard.

Dans quelles conditions, jusqu’où peut-on confier la gestion de ce que l’on a de plus précieux à une mécanique dont on ne comprend pas les décisions et dont la téléologie a pour nécessite première une définition du bien ? Cette question n’est donc pas neuve et je renvoie ici à la définition de la morale par Charles Darwin dans the descent of man (1871)  qui me semble la plus complète.

 

 

[4] NOTE :Expert et ex-père : Le mot expert issu du latin « expertus » n’est ni un nom de métier, ni un nom d’action, c’est un participe passé, qui exprime un état, et signifie : « en dehors d’'éprouvé, ici, détaché »

Naturellement un « ex-père » n’existe pas, car le mot est un oxymore, puisque par définition une paternité n’expire jamais, mais l’idée du jeu de mot me vient parce qu’on dirait que les experts se multiplient quand les pères se raréfient.

Le génie des langues produit du sens par les procédés les plus divers et inattendus - à moins que les sens ne fussent déjà là et cachés.

Le généticien Jacques Monod (1910 1975, prix Nobel de médecine1966) écrivait à propos de l’évolution animale, dans « Le hasard et la nécessité - 1970 » : « La nature bricole » - par exemple quand la baleine prend des airs de poisson - et il est remarquable que l’on puisse le dire autant du langage qui, fait remarquable, semble très souvent obéir à des lois qui sont les mêmes ou très semblables.

A propos de « prouver » je me souviens de l 'anecdote d’une jeune illettrée un peu turbulente à qui une administration avait demandé de signer la reconnaissance de son acte (d'avoir cassé un carreau) laquelle transcrivit innocemment mais dans un contre-sens absolu la formule usuelle qu’on lui dictait : «  lu et à prouver »

 

 

[5] NOTE : Existentielle : Il suffira de dire ici que cette simple et banale constatation montre combien le psychisme de chacun est présent dans tout acte de médecine - ce qui souligne combien est importante la nécessité d'un désengagement total de toute implication partisane pour s’y soumettre, disponible – cf. Henri Dunant.

Le XIX eme siècle européen a culminé dans ses pérégrinations linguistiques, mais la vérité qui s'en énonce sous l’adage « traduttore traditore » est transposable encore bien plus loin, jusque dans ce qu’on croit être de fidèles répétitions. Car à l'insu de chaque locuteur elles se conjuguent aussi avec sa propre vérité, celle-là même qui lui est la mieux cachée.

A propos de l’intéressant préfixe « ex- » ici présent sur lequel est construit le mot existence, les médecins ont depuis longtemps compris que les notions d’intérieur et d'extérieur d'un corps vivant ont une signification toute autre qu’administrative.

Dans le cas des échanges conduisant à la procréation, un ovule se conjugue à un spermatozoïde dans un utérus, pour former un enfant et un placenta lequel est génétiquement celui de l’enfant, et commande en retour la physiologie de la mère, etc.

Mais qui pourrait dire par quel mouvement ou à quel moment se produisit la première extériorité de la première division de la première particule, qui fut comme un premier signal de vie ?

 

 

[6]  NOTE : Prise de la bastille en 1789 : La grande déception de la trouver presque vide : « Il y avait 7 détenus, fous ou criminels, qu'il fallut bientôt enfermer ailleurs ». Fr. Olivier-Martin. « Histoire du droit français des origines à la Révolution ». Réédition CNRS 1992.

 

 

[7]  NOTE : Loi de 1970 : Séparation de la médecine et de la psychiatrie : Jusqu'en 1970 la psychiatrie s’est trouvée écartelée car attachée par deux cordons, par l'un à la médecine « normale » et par l'autre à l'administration du pouvoir exécutif (voir séparation)

La loi décidant de la séparation de la médecine et de la psychiatrie – pour satisfaire aux engouements de l’époque (tant des idéologues avides de « psychologie pure » que des opportunités de nouveaux postes prestigieux à créer) - aura coupé « le mauvais cordon » !

C’est celui de la dépendance exécutive qu’il fallait couper.

 

Sous mine de modernité c’était au contraire une plongée dans l’obscurantisme : Confier la chimie au psychologue revient à demander au chirurgien de « panser »  la « pensée »

C’était d'autant plus regrettable que Henri Laborit venait de découvrir la Chlorpromazine (Largactil) en 1951, premier neuroleptique de synthèse, mais pour une toute autre raison : Il avait trouvé un hibernateur artificiel injectable qui permettait de prolonger les « opérations à cœur ouvert ». Le produit gagna rapidement les pavillons des agités des asiles. Mais il ne faisait que calmer.

C’est alors qu'il aurait fallu justement éveiller les médecins aux sciences nouvelles, mais au contraire on les en détournait.

Les laboratoires pharmaceutiques, eux, continuaient à fabriquer toujours de nouvelles molécules dont ils expérimentaient les effets sur de petits mammifères, et dont les media propageaient les échos embellis au public crédule et de plus en plus avide, même au delà des soins supposés, de toutes sortes de dépendances nouvelles dans un climat délétère et propice. 

Mêlant largement les mots et les choses, il fallut renommer l’Halopéridol à cause des jeux sur son nom, et parce qu’il était trop puissant le Divinoctal fut retiré de la vente. Les travaux de recherche sur le LSD furent interdits par la loi. Mais qu’est-ce qui est dangereux ?

Sont-ce les somnifères au prétexte qu’ils pourraient faire dormir, ou de ne pas connaître le monde, la matière et partant les usages ?

Car alors en effet, désarmés et livrés aux chants envoûtants des Sirènes, il ne resterait plus qu'à attacher l’équipage avec les passagers au grand mât de la barque fatale, qui serait même trop exiguë !

 

Au delà de l’emphase littéraire, il est dramatique de constater que :

1)     L'alliance du pouvoir et du commerce continuent de perpétrer une situation telle qu’à force de croyances inculquées et de contraintes conjuguées, la France soit devenue le premier consommateur de neuroleptiques (peut-être fabriqués ailleurs) par habitant au monde,

2)     Que les ventes en pharmacie de ces mêmes produits occupent en quantité et en prix les toute premières places de l’activité,

3)     Et que le budget national alloué aux immenses et omniprésents services « psy » (administrateurs, assistants, conseillers du moindre des agissements de chacun, etc.) pourraient sans doute rivaliser honorablement avec les fameux biens du clergé en leur temps confisqués,

a)    à ceci près que les biens appartiennent cette fois déjà à l'état,

b)    et que les substances incorporées sont loin d’avoir l'innocuité biologique qu'avait l'hostie sacramentelle.

 

 

[8] NOTE : Une trinité hétéromorphe : Le religieux et l’état font partie d’un ensemble ternaire (dont le troisième terme est le peuple) qui instaure une pérennité par engendrement.

Typiquement de même, les noms de père ou de mère suffisent pour être sémantiquement révélateurs d’une trinité dont chacun des trois termes (avec la progéniture) renvoie de façon indéliable aux deux autres (sans laquelle les protagonistes ne s’appelleraient pas autrement que homme ou femme) L'appellation de chacun implique l’existence des deux autres.

Les noms : Sur le plan pratique, la préoccupation des noms est toujours importante, et le demeure pour les enfants même en l’absence de mariage légal de leurs parents, enfants pour qui la désignation d’une filiation par leur nom était dans l’essence du rite. L’habitude de masquer les noms de jeune fille me semble toujours regrettable et la formulation officielle de l'état civil est la seule façon correcte de nommer les personnes. Pour l’enfant, le nom du père suivi du nom de jeune fille de la mère est simple et parfaitement représentatif.

Sur le christianisme : Celui-ci conjugue quatre éléments suivant deux trinités qui ont chacune un sens métaphorique.

La première est une trinité charnelle de type osirienne (La vierge Isis, Osiris mort et Horus) et réunit La vierge Marie, le Saint esprit et Jésus (cf. La conversion religieuse de la Grèce) Le Saint Esprit est ici en place de père.

La seconde est divine et révélatrice d’une spiritualité pure excluant tout engendrement (la mère en ayant disparu) dont les trois personnes sont le Père, le fils et le Saint Esprit. Le Saint Esprit est ici en place de mère.

Et si cette seconde trinité ne retient pas la mère, c’est que celle-ci détient la qualification hors pair de rendre possible l’engendrement, mais ici il n'y en a pas..

Le Verbe, comme organisateur et annonciateur des deux trinités serait alors un cinquième terme plus primordial encore, n’en était-ce une assimilation possible avec le Saint Esprit, ce qui représente sans doute la difficulté la plus profonde, aussi immanente que transcendantale, de la compréhension de chacune de nos existences.

 

Je profite de l’occasion de la trinité pour développer cette note dans un sens qui n'est pas directement en rapport avec le sujet traité, mais qui est pourtant d’une actualité éternelle. L ‘ajout sera bref en raison de la précarité de ma logistique.

La triade paradigmatique fondamentale de la famille père-mère-enfant - et qui ne découle pas nécessairement des conditions de la procréation, point essentiel –  telle que je l’ai décrite ici, est de structure boroméenne : Un nœud borroméen est défini par le fait qu’il suffit que l'un de ses trois cercles constitutifs soit dénoué pour que les deux autres le soient aussi. Lacan en a introduit la topologie en psychanalyse pour nouer boroméennement le Symbolique, l’Imaginaire et le Réel par les Noms du Père. L’usage en est étonnement fertile. Mais s'il faut remarquer que les trois cercles du nœud sont strictement équivalents par permutation des trois cercles entre eux, la boroméenneté du nœud n'est donnée que par l’agent du nouage.

Ici j’ai indiqué la triade familiale telle qu’elle apparaît habituellement aux yeux de tous. En pathologie il en va autrement : Par exemple, il se peut que les 3 personnages soient liés boroméennement par un Nom, mais qu’ils ne le soient pas par le symbolique, auquel cas le père, la mère et l’enfant ne seront pas noués de cette façon, et ainsi de suite. Le fait devient de plus en plus notable et important dans notre société et peut le devenir plus encore.

Lacan disait que si la psychanalyse « ne prend pas », elle sera remplacée par la religion, et il ajoutait que la vraie religion est le christianisme. Pourtant, il n’est pas bien sûr que l’une et l’autre s’excluent totalement : Historiquement la psychanalyse a été inventée par Freud, mais on a sans arrêt l’impression qu'elle est née du judaïsme, mais en opposition avec lui, puisque Freud ne cesse d’asséner contre les religions qu’elles sont des illusions*. Lacan de même, mais à partir du christianisme : Le nœud boroméen est devenu très tôt dans l'Eglise le symbole même du dogme le plus central du christianisme. Et le plus étonnant y est l’absence de rapport évident avec sa morale, et il en est de même pour tous les chapitres fondamentaux sur le verbe (jusqu’au miracle de la Pentecôte) et ils ne sont liés que par miracle. Pourtant la continuité est facilement perceptible. Et Lacan a emprunté l’image du nœud boroméen pour théoriser la psychanalyse.

Il apparaît qu'on fait de nombreuses confusions quand on parle des religions.  Le christianisme présente plusieurs niveaux de présentation : Sa morale est celle des anciens Egyptiens (Celle du catéchisme reproduit de près celle du « Livre pour sortir au jour », « Todtenbuch » de Lepsius, qui a traversé les millénaires) Sa conception de la Trinité (encore une fois triade différente de celle d’une reproduction sexuée) n’apparaît au contraire que comme une construction progressive au cours de ces mêmes millénaires. Par contre, ses images évangéliques présentées comme miracles, si symboliques pourtant, à la façon des hiéroglyphes, sont devenues incompréhensibles à notre époque qui a perdu le sens de ces paraboles..

C’est pourquoi, on pourra apercevoir plus de profondeur dans les dernières élaborations dogmatiques originales, que dans les règles de conduites morales devenues banales et communément partagées, reconduites du catéchisme aux Droits de l’Homme, et de celui-ci aux OMG, etc., Ce sont pourtant les idées  de miracles qui ont porté ces élaborations, tout de même que ce sont les idées de justice qui avaient engendré leur déesse, Mâat, dont plus tard on les a fait procéder.

Quant à la topologie des nœuds elle est l’une des plus récentes branches des mathématiques, mais aussi l'une des plus prodigieuses.

En revanche, la balance d’Osiris s’est édulcorée en une balance d’égalités incompréhensibles, et ce n’était pas du tout son sens. Dans nos exemples ci-dessus touchant à des sujets fondamentaux, qui peut dire sans rire que l’égalité du droit parental d’une mère est l’égal d’une égalité du droit parental d'un père, et dire que ce principe est la base d'une démocratie à deux, puisque les deux sont un couple dont chaque partie est aussi différente (en sa fonction ici évoquée) que la main droite de la main gauche ?

 

Dans un encart (clic), je commente un ouvrage de la FMSH (Fondation de la Maison des Sciences de l'Homme) , organisme public que nous payons cher avec nos impôts - dont la production ici d’avère typiquement mono-idéologique, voire auto-engendrée : Il s'intitule « Les papas en danger ?»  Et, comme s’il prenait « le nom de papa » pour « l’enfant qui en est la cause », il en manque l’objet de son rôle, et se veut rassurant.

Pourtant dire que « les papas ne sont pas en danger » ne veut pas dires que « les enfants sont en sécurité », même au prix d'appeler « papas » les pères, sans doute pour les rapprocher des enfants, ce qui les éloigne encore davantage de leur fonction « de ne pas être un enfant ! »

Selon le nouage de la triade familiale, non plus par les noms, mais cette fois par le Symbolique, un autre sens apparaît alors : En effet : « Ce n’est pas parce que le père a un enfant, que l’enfant a un père » Cela ne suffit pas. La relation entre les protagonistes n’est pas réflexive.

 

En tout cela, le christianisme nous a offert une profondeur de méditation certaine.

Mais quoi d'aussi étrange que notre concept - ou complexe - de psychisme (dont on lui a du l’énonciation comme âme) qui serait propre à chacun, en partie transmis et en partie acquis, capricieux et soumis à de nombreux aleas ?  Or il est celui qui produit notre conscience.

Si les miracles ont cessé de répondre aux mystères, il n'est pourtant pas sûr que ces derniers pour autant disparussent.

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*Ce qui ne l’empêche pas d'évoquer les puissances naturelles :

« Les hommes d'aujourd'hui ont poussé si loin la maîtrise des forces de la nature qu'avec leur aide il leur est devenu facile de s’exterminer mutuellement jusqu’au dernier. … Et maintenant il y a lieu d’attendre que l'autre des deux puissances célestes, l'Eros éternel, tente un effort afin de s'affirmer dans la lutte qu'il mène contre son adversaire non moins immortel [Thanatos]  »

 

FIN de « Malaise dans la civilisation » (1929) - Sigmund Freud (1856-1939)

 

 

[9]  NOTE : Réalité physique : Et aussi d’une réalité physique de deux corps en un, qui sont loin de tout partager, réalité qui mériterait d’être beaucoup plus prise en considération comme telle.

Il serait dommage d’en faire un déni de réalité justifiant un déni juridique, comme une clandestinité justifiant un « droit clandestin » faisant d’un oxymore une nouvelle aporie.

 

 

[10]  NOTE : Physiologie hormonale : Et ce ne sont pas les apôtres des neuroleptiques qui nieront les effets de la chimie hormonale sur les sentiments et les comportements.

 

 

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F in des notes de bas de page

 

 

 

 

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